Indemnité de résiliation anticipée d’un contrat administratif : le Conseil d’Etat fixe les critères

Catégorie

Contrats publics

Date

January 2023

Temps de lecture

2 minutes

CE 16 décembre 2022 SNC Grasse-vacances, n° 455186 : publié au Rec. CE

Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat affirme que les parties à un contrat administratif peuvent déterminer les modalités d’indemnisation du cocontractant en cas de résiliation amiable dès lors que le montant versé n’excède pas le montant du préjudice subi par le cocontractant et des dépenses non-couvertes.

Revenons sur les faits.

Dans cette affaire, la commune de Grasse a conclu, le 9 février 1966, un bail emphytéotique d’une durée de soixante ans avec la SCI de Grasse-vacances (devenue SNC Grasse-vacances) sur un terrain situé au lieu-dit Clavary avec obligation pour la société d’y construire et d’exploiter un village de vacances. Pendant la durée du bail, la société a fait part à la commune de sa volonté de mettre fin au contrat de manière anticipée ce qu’a accepté le conseil municipal dans une délibération du 20 septembre 2016 accordant la somme de 1 700 000 EUR à la société cocontractante à titre d’indemnité.

La délibération a fait l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif de Nice qui a annulé la délibération au motif que les stipulations contractuelles faisaient obstacle à l’indemnisation du cocontractant en raison du retour anticipé des biens à titre gratuit dans le patrimoine de la collectivité. La SNC Grasse-vacances a interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Marseille qui a confirmé le jugement de première instance 1)CAA Marseille 7 juin 2021 SNC Grasse-vacances, req. n° 19MA03238. La société a alors formé un pourvoi à l’encontre de cet arrêt.

C’est ainsi que le Conseil d’Etat a été amené à traiter de la fixation de l’indemnité de résiliation amiable d’un contrat administratif.

Les juges du Palais-Royal ont ainsi affirmé le principe selon lequel les parties cocontractantes d’un contrat administratif peuvent déterminer l’étendue et les modalités des droits à indemnité en cas de résiliation amiable du contrat à la seule condition que l’indemnité allouée n’excède pas la somme :

  • du montant du préjudice subi par le cocontractant du fait de la résiliation
  • des dépenses exposées et non couvertes du fait de la résiliation

Ainsi, le Conseil d’Etat retient deux possibilités différentes afin de calculer le montant de l’indemnisation à verser au cocontractant et retient, en l’espèce, le calcul le plus avantageux pour le cocontractant.

En effet, la cour administrative d’appel de Marseille avait jugé que l’indemnité à verser à la société ne pouvait qu’être égale qu’à la perte du bénéfice escompté si le contrat était arrivé à son terme, c’est-à-dire au manque à gagner. A contrario elle avait estimé que l’indemnisation de la société à hauteur de la valeur vénale du terrain incluant les constructions existantes était constitutif d’une « concession manifestement disproportionnée, constitutive d’une libéralité » classiquement interdites aux personnes publiques 2)CE 19 mars 1971 Mergui, req. n° 79962 : Rec. CE. Appliquant ses deux modes de calcul aux faits d’espèce, le Conseil d’Etat a estimé que la cour aurait dû tenir compte de la valeur de cession des droits du bail pour déterminer si le montant de l’indemnité accordée à la société était excessif.

Ainsi, dès lors que la cour administrative d’appel de Marseille avait refusé de tenir compte de ce montant pour évaluer le montant du préjudice subi par la société du fait de la résiliation anticipée, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt et a renvoyé à la même cour le soin de juger à nouveau cette affaire.

 

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