La Ville de Paris durcit son règlement municipal relatif au changement d’usage de locaux d’habitation et renforce le contrôle des meublés de tourisme

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

January 2022

Temps de lecture

5 minutes

Règlement municipal fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage de locaux d’habitation et déterminant les compensations en application de la section 2 du chapitre 1er du titre III du livre VI du Code de la construction et de l’habitation adopté le 15/12/2021 par le Conseil de Paris et publié au Bulletin officiel du 6 janvier 2022 (délibération 2021 DLH 459)

Poursuivant son objectif de protection du logement dans la capitale, et forte de la validation du dispositif de changement d’usage par les juridictions françaises et européennes 1)[1] Le dispositif de contrôle de la transformation de locaux d’habitation en locaux meublés à une clientèle de passage n’y élisant pas domicile, de manière répétée et pour de courtes durées, a été validé au niveau européen par la Cour de justice de l’Union Européenne dans sa décision CJUE 22 septembre 2020 Cali Apartments SCI et HX,  Aff. C-724/18 et C-727/18, puis par la cour de cassation, dans sa décision Civ 3e 18 février 2021 Cali Apartments, Pourvoi n° H 17-26.156., la Ville de Paris a adopté, le 15 décembre dernier, une délibération visant à renforcer le dispositif existant des autorisations de changement d’usage et du dispositif de compensations, en modifiant le règlement municipal existant sur le changement d’usage des locaux d’habitation.

Si les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage et les règles de compensation qui y sont attachées sont renforcées, le règlement municipal modifié affiche surtout un objectif clair de lutte contre les plateformes de location de courte durée de type Airbnb ou Booking, par l’institution d’un nouveau secteur dans lequel la transformation de logements en meublés de tourisme sera sévèrement encadrée.

1.    L’introduction d’un nouveau secteur renforcé pour la transformation de logements en meublés de tourisme – modification de l’article 3 du règlement municipal

En application de l’article 3 du règlement municipal, la transformation d’un logement en meublé de tourisme est subordonnée à une compensation qui suit les règles de compensation classiques telles que définies à l’article 2 du règlement : 1 m² de compensation pour 1 m² de logement supprimé – 2 m² de compensation si l’on se trouve dans le secteur de compensation renforcée, sauf en cas de compensation sous forme de logements locatifs sociaux où la règle du 1 m² pour 1 m² retrouve à s’appliquer. En outre, la compensation à apporter en cas de transformation de logement en meublé de tourisme doit être effectuée au sein du même quartier administratif que celui où se situe le logement supprimé.

Le Règlement modifié vise au durcissement de ces règles, justifié par la Ville dans l’exposé des motifs de sa délibération par le fait que, si la crise sanitaire a nécessairement impacté les locations touristiques de courte durée, l’offre de telles locations est restée bien présente et l‘activité des plateformes s’est maintenue (le nombre d’annonces sur Airbnb reste équivalent à celui avant la crise sanitaire). Anticipant la reprise progressive de l’activité touristique, la Ville de Paris souhaite ainsi renforcer les conditions de transformation de logements en meublés de tourisme, notamment dans certains secteurs sensibles.

Le Règlement modifié crée ainsi un nouveau secteur, défini sur la base du nombre de déclarations des meublés de tourisme effectuées auprès de la Ville et incluant Paris centre, 5e, 6e, 7e, 8e, 9e, 10e , 11e et 18e, au sein duquel les règles de compensation applicables seront particulièrement sévères :

Dans ce secteur, il est désormais exigé une compensation de 3 m² pour 1 m² de logement supprimé, et ce, y compris en cas de compensation sous forme de logements locatifs sociaux. Autrement dit, les compensations proposées sous forme de logements locatifs sociaux ne permettent pas de bénéficier de règles plus souples de compensation.

Cette compensation de 3 m² pour 1 m² reste en outre exigée au sein du même quartier administratif, tel que cela était déjà prévu par l’ancienne rédaction de l’article 3 du Règlement municipal.

2.   L’extension de la règle des 50% de compensation dans le même arrondissement en cas de compensation en logements locatifs sociaux – modification de l’article 2 II du règlement municipal

Aux termes de l’article 2 du règlement municipal qui définit les règles de compensation pour la transformation de locaux d’habitation en autre que d’habitation, les locaux proposés au titre de la compensation doivent être situés dans le même arrondissement que les locaux d’habitation faisant l’objet du changement d’usage. A titre de dérogation, lorsque l’on compense en logements locatifs sociaux, la compensation proposée peut être située au sein de l’ensemble de ce secteur, et n’a donc pas nécessairement à être située dans le même arrondissement.

Néanmoins, constatant un déficit en logements très accentué dans certains arrondissements, le Règlement avait défini en 2015 un sous-secteur correspondant aux 1er, 2e, 4e, 5e ,6e, 7e, 8e, 9e arrondissements, au sein duquel 50% de la surface transformée doit être compensée dans le même arrondissement.

Désormais, le Règlement municipal élargit cette règle de 50% de compensation dans l’arrondissement à trois arrondissements additionnels, que sont les 3e, 16e et 17e arrondissements.

3.   L’extension à tout le secteur de compensation renforcée de l’obligation de proposer un nombre de logements créés au moins équivalent au nombre de logements supprimés – modification de l’article 2 II du règlement municipal

Le dernier alinéa de l’article 2 du Règlement prévoit que le nombre de logements offerts en compensation doit être au minimum identique au nombre de logements supprimés. Cette règle était applicable dans les arrondissements du secteur de compensation renforcée qui n’étaient pas concernés par la règle des 50% de compensation au sein du même arrondissement (arrondissements ou parties d’arrondissements du 3e, 10e, 11e, 14e, 15e,16e, 17e et 18e).

Désormais, le Règlement étend cette obligation de proposer en compensation un nombre de logements au minimum identique au nombre de logements supprimés à l’ensemble du secteur de compensation renforcée.

4.   Les clarifications de rédaction et l’amélioration du régime des autorisations personnelles de changement d’usage

La modification du Règlement municipal est également l’occasion de plusieurs clarifications et de simplifications.

La rédaction de la règle de compensation applicable au sein de la même unité foncière est clarifiée et complétée désormais comme suit : « III – Dans l’ensemble des arrondissements parisiens, si des locaux sont transformés et compensés par un même propriétaire en totalité au sein d’une même unité foncière, dans le cadre d’une rationalisation des surfaces d’habitation de cette unité, la surface minimale exigée, au titre de la compensation, correspond à la surface des locaux transformés ».

Dans un souci de cohérence, la liste des pièces à joindre à une demande de changement d’usage réel avec compensation est également adaptée.

Enfin, le Règlement municipal modifié fait évoluer les dispositions de l’article 4 relatif aux demandes d’autorisation de changement d’usage à titre personnel sans compensation délivrées pour les professions libérales, les fondations ou associations, et aux personnes exerçant les missions d’intérêt général. Le Règlement va dans le sens d’une simplification de l’instruction de ces demandes d’autorisation personnelle, s’agissant en particulier des pièces justificatives à joindre à la demande.

 

 

 

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References   [ + ]

1. [1] Le dispositif de contrôle de la transformation de locaux d’habitation en locaux meublés à une clientèle de passage n’y élisant pas domicile, de manière répétée et pour de courtes durées, a été validé au niveau européen par la Cour de justice de l’Union Européenne dans sa décision CJUE 22 septembre 2020 Cali Apartments SCI et HX,  Aff. C-724/18 et C-727/18, puis par la cour de cassation, dans sa décision Civ 3e 18 février 2021 Cali Apartments, Pourvoi n° H 17-26.156.

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