L’article 1792-7 du code civil n’est pas applicable à la garantie décennale à laquelle sont tenus les constructeurs au titre de marchés publics de travaux

Catégorie

Contrats publics

Date

July 2023

Temps de lecture

2 minutes

CE 5 juin 2023 Société Rousseau, req. n° 461341 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

Par un arrêt du 5 juin 2023, le Conseil d’Etat se prononce de manière inédite sur l’applicabilité des dispositions de l’article 1792-7 du code civil à un marché public de travaux.

Le service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM) a confié à la société Rousseau le remplacement d’une centrale à eau glacée et une centrale de traitement d’air ainsi que la refonte de la ventilation d’un atelier de reprographie.

Les travaux ont été réceptionnés sans réserve en juillet 2011 mais, peu de temps après, des dysfonctionnements sont survenus obligeant le SHOM a arrêté le système un an plus tard.

Le SHOM a donc saisi le tribunal administratif de Rennes afin que ce dernier condamne la société Rousseau, au titre de la garantie décennale, à la réparation des préjudices résultant d’une part du remplacement des groupes frigorifiques défectueux et d’autre part de la location et d’installation de groupes de remplacement. Par un jugement en date du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande du SHOM.

Toutefois, par un arrêt rendu le 17 décembre 2021, la cour administrative de Nantes a annulé le jugement et a condamné la société Rousseau à verser au SHOM la somme de 201 116,79 EUR en réparation des préjudices subis.

La société Rousseau a alors saisi le Conseil d’Etat, qui annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes.

Après avoir rappelé les principes régissant la garantie décennale des constructeurs, le Conseil d’Etat refuse d’appliquer en matière de marchés publics de travaux les dispositions de l’article 1792-7 du code civil, selon lesquelles « Ne sont pas considérés comme des éléments d’équipement d’un ouvrage au sens des articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 1792-4 les éléments d’équipement, y compris leurs accessoires, dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage ».

En l’espèce, il juge qu’il ne revenait pas à la cour administrative d’appel de Nantes de « rechercher si les équipements en cause avaient pour fonction exclusive l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage ».

Le Conseil d’Etat a ainsi suivi les préconisations de son rapporteur public, qui soulignait dans ses conclusions que les dispositions de l’article 1792-7, combinées avec celles des articles 1792-2 et 1792-3, pourraient conduire à « réduire significativement le champ des garanties décennale et biennale, en allant jusqu’à exclure de leur champ des équipements pourtant « indissociables » au sens de la définition « physique » qu’en donne l’article 1792-2 ».

Cette décision illustre une nouvelle fois l’autonomie du droit administratif.

En effet, les juges du Conseil d’Etat s’accordent depuis longtemps maintenant à admettre une part d’autonomie du droit administratif lorsque le Conseil d’Etat est amené à apprécier l’applicabilité des dispositions du code civil, et ce particulièrement en matière de garantie décennale, dans la mesure où ils s’inspirent des dispositions dudit code pour apprécier la responsabilité des constructeurs 1)CE 15 avril 2015 Commune de Saint-Michel-sur-Orge, req. n° 376229.

 

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1. CE 15 avril 2015 Commune de Saint-Michel-sur-Orge, req. n° 376229

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