L’avis défavorable de la CNAC est un acte préparatoire insusceptible de recours

Catégorie

Aménagement commercial, Droit administratif général, Urbanisme et aménagement

Date

April 2020

Temps de lecture

4 minutes

CE 25 mars 2020 Société Le Parc du Béarn, req. n° 409675 : mentionné aux Tables du Rec. CE

Dans la lignée de ses précédentes décisions sur le régime contentieux des permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale délivrés sur le fondement de l’article L. 425-4 du code de l’urbanisme, le Conseil d’Etat vient de confirmer que l’avis de la CNAC était un acte préparatoire insusceptible de faire l’objet d’un recours contentieux y compris lorsqu’il s’agit d’un avis défavorable :

« (…) l’avis de la Commission nationale d’aménagement commercial a désormais le caractère d’un acte préparatoire à la décision prise par l’autorité administrative sur la demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, seule décision susceptible de recours contentieux. Il en va ainsi que l’avis de la Commission nationale d’aménagement commercial soit favorable ou qu’il soit défavorable. Dans ce dernier cas, la décision susceptible de recours contentieux est la décision, le cas échéant implicite en application des dispositions citées au point 3, de rejet de la demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ».

Le pétitionnaire qui se voit opposer un avis défavorable en CNAC a donc uniquement la possibilité de contester le refus de permis qui doit en découler, le cas échéant tacitement, puisqu’il ressort de l’article R. 424-2 h) du code de l’urbanisme qu’une décision implicite de rejet naît du silence de l’administration en cas d’avis défavorable de la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC).

Dans cette affaire, par sécurité, la société pétitionnaire avait contesté devant la cour administrative d’appel de Bordeaux à la fois l’avis défavorable de la CNAC mais également le refus implicite de permis né du silence gardé par le maire à l’issue du délai d’instruction du permis.

Ces affaires avaient donné lieu à deux ordonnances de la cour administrative d’appel de Bordeaux, toutes deux contestées devant le Conseil d’Etat :

  • La requête exercée contre l’avis défavorable de la CNAC avait été rejetée pour irrecevabilité au motif que : « les pétitionnaires, qui sont au nombre des personnes visées à l’article L.752-17 du code de commerce, ne peuvent présenter de recours pour excès de pouvoir qu’à l’encontre d’un refus du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, et non à l’encontre de l’avis défavorable de la commission nationale d’aménagement commercial, lequel a un caractère préparatoire et ne peut être directement contesté que par l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, qui en est destinataire». (CAA Bordeaux Ordonnance 7 février 2017 SCI Le Parc du Béarn, req. n° 17BX00172). C’est cette solution qui a été confirmée dans la décision du Conseil d’Etat commentée ;
  • La requête exercée contre le refus implicite de permis avait également été rejetée par la cour mais pour un motif plus étonnant puisqu’elle avait considéré que, si : « en cas d’avis défavorable de la commission nationale d’aménagement commercial, le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne peut être légalement délivré, et qu’il appartient donc à la commune qui aurait laissé naître un permis tacite de le retirer dans le délai de trois mois prévu par l’article L. 424-5, l’article L. 425-4 n’a pas modifié le régime général de délivrance des permis de construire, ni édicté une exception au principe selon lequel le silence de l’autorité compétente fait naître un permis de construire tacite. / Dans ces conditions, aucun refus tacite n’a pu naître à l’expiration du délai d’instruction de la demande de la SCI Le Parc du Béarn, qui se trouve donc titulaire d’un permis de construire tacite. Par suite, sa requête aux fins d’annulation d’un tel refus est sans objet, et donc manifestement irrecevable» (CAA Bordeaux Ordonnance 29 mars 2017 SCI Le Parc du Béarn, req. n° 17BX00889). La cour avait donc considéré que le silence gardé par l’administration faisait naître un permis tacite malgré l’avis défavorable de la CNAC.

La cour a été contredite sur ce point par le Conseil d’Etat qui, saisi d’un recours exercé contre cette ordonnance, a jugé le 1er février 2019 que :

« le silence gardé par l’autorité administrative sur une demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale fait naître une décision tacite de rejet de cette demande. Par suite, en jugeant qu’à l’expiration du délai d’instruction de la demande de permis de construire déposée par la société Le Parc du Béarn en vue de la réalisation d’un projet soumis à autorisation d’exploitation commerciale, cette société s’était trouvée titulaire d’une autorisation tacite, la présidente de la 1ère chambre de la cour administrative d’appel de Bordeaux a entaché son ordonnance d’erreur de droit » (CE 1er février 2019 SCI Le Parc du Béarn, req. n° 411061).

Mais, la cour a constaté son erreur avant la décision du Conseil d’Etat à l’occasion d’un recours exercé par des concurrents du projet contre la décision implicite de permis en jugeant que : « La société Wilis ne peut utilement se prévaloir de l’ordonnance du 29 mars 2017 rejetant comme irrecevable la demande de la SCI Le Parc du Béarn dirigée contre le refus implicite de permis de construire résultant de l’avis défavorable rendu par la commission nationale d’aménagement commercial le 27 octobre 2006, dès lors qu’il résulte des dispositions précitées de l’article R.424-2 du code de l’urbanisme que les motifs en étaient erronés, comme l’a reconnu la cour en mettant à l’instruction une seconde requête de la SCI Le Parc du Béarn dirigée contre le certificat de refus de permis de construire émis le 29 mars 2017 par le maire de Lons, requête qui a été communiquée à la société Wilis. Par suite, la présente requête aux fins d’annulation d’un permis de construire qui n’est jamais né est sans objet, et donc manifestement irrecevable » (Ordonnance 4 août 2017 req. n° 17BX02249 ).

Et c’est enfin à l’issue d’une procédure chaotique que la SCI Le Parc du Béarn, qui a contesté devant la cour le certificat de refus de permis émis par le maire, s’est vu refuser son projet au fond au motif qu’il compromettait les objectifs fixés par la loi…

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