Le choix d’une offre anormalement basse soumis au contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation

Catégorie

Contrats publics

Date

March 2012

Temps de lecture

2 minutes

CE 1er mars 2012 Département de la Corse du Sud, req. n° 354159

Par cet arrêt, le Conseil d’Etat précise l’interprétation de l’article 55 du code des marchés publics, lequel dispose que si une offre paraît anormalement basse, le pouvoir adjudicateur « peut » la rejeter par décision motivée, après avoir demandé par écrit les précisions qu’il juge utiles et vérifié les justifications fournies.

L’interprétation littérale de ce texte devrait amener à conclure que le rejet d’une offre anormalement basse constitue une simple faculté du pouvoir adjudicateur (voir en ce sens TA Versailles 13 mai 2008 commune de Plaisir, req. n° 0506110, Contats et marchés publ. 2008 n° 184, note G. Eckert). Toutefois, la tendance des juridictions du fond semblait davantage à la sanction du choix par un pouvoir adjudicateur d’une offre anormalement basse (voir par exemple CAA Marseille 12 juin 2006 SARL Stand Azur, req. n° 03MA02139).

Précisément, l’ordonnance contestée dans cette affaire avait censuré, à la demande d’un concurrent évincé, le choix par un pouvoir adjudicateur d’une offre qu’elle qualifiait d’anormalement basse (TA Bastia 3 novembre 2011 société Autocars Roger Ceccaldi, req. n° 1100957).

Sans se prononcer expressément sur l’obligation de rejeter une offre anormalement basse, le Conseil d’Etat estime cependant que le juge doit contrôler l’erreur manifeste d’appréciation qu’aurait pu commettre un pouvoir adjudicateur en sélectionnant une offre qui correspond à une telle qualification. Un tel raisonnement s’inscrit nettement dans le sens d’une obligation faite au pouvoir adjudicateur de rejeter une offre anormalement basse.

Cette solution est cohérente avec la doctrine des pouvoirs publics sur le sujet, laquelle a été d’ailleurs été récemment modifiée. En effet, si la circulaire du 29 décembre 2009 relative au Guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics indiquait que « […] Retenir une offre anormalement basse ne présente en soi aucun risque juridique. […] », la nouvelle circulaire du 14 février 2012 retient une position diamétralement différente, en soulignant que : « […] Lorsque les explications demandées ne permettent pas d’établir le caractère économiquement viable de l’offre anormalement basse eu égard aux capacités économiques, financières et techniques de l’entreprise, le pouvoir adjudicateur est tenu de rejeter l’offre […] » (Guide des bonnes pratiques en matière de marchés publics, circulaire du 14 février 2012).

Si le Conseil d’Etat exerce bien un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation sur le choix d’une offre anormalement basse, il censure toutefois l’ordonnance attaquée en estimant qu’en l’espèce, l’offre considérée n’était pas anormalement basse. Ainsi, la Haute Juridiction précise que si une obligation de reprise du personnel s’applique au nouveau titulaire d’un marché, elle ne lui impose pas d’affecter l’ensemble du personnel repris à l’exécution dudit marché. Partant, le candidat n’est pas tenu d’intégrer dans son offre le coût du personnel repris, mais bien seulement le coût du personnel qu’il affecte à l’exécution du marché.

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