Le Conseil d’Etat précise le contenu de l’étude d’impact en matière d’effets indirects sur l’environnement

Catégorie

Environnement

Date

April 2023

Temps de lecture

2 minutes

CE 27 mars 2023 Association France Nature Environnement et autres, req. n° 450135 : mentionné aux T du Rec. CE

Par une décision en date du 27 mars 2023, le Conseil d’Etat précise le contenu de l’étude d’impact et la nécessaire prise en compte des effets indirects du projet sur l’environnement.

Par un arrêté pris au titre de la législation ICPE, le préfet des Bouches-du-Rhône a autorisé une société à poursuivre l’exploitation des installations d’une centrale, à exploiter de la biomasse et à créer différents bâtiments en lien avec l’exploitation de cette biomasse.

Devant la cour administrative d’appel de Marseille 1)CAA Marseille 24 décembre 2020 Sté Uniper France Power, req. n°17MA03489, n°17MA03528, l’association requérante soutenait que l’étude d’impact de ce projet était insuffisante, ne tenant pas compte des techniques d’approvisionnement en bois forestier.

Pour rappel, le contenu de l’étude d’impact était précisé par l’ancien article R. 512-8 du code de l’environnement 2)R. 512-8 c. env qui imposait une analyse de l’état initial du site et une analyse des effets directs et indirects de l’installation sur l’environnement. Il s’agit d’une transposition fidèle de la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement. Ces dispositions sont reprises par la réglementation en vigueur 3)R. 122-5 c. env.

La CAA avait souligné que « si l’approvisionnement en bois forestier de la centrale est une condition de son exploitation, l’exploitation forestière et la production d’électricité ont cependant leur finalité propre et répondent à ses objectifs différents. Elles constituent des opérations pouvant être mises en œuvre de façon indépendante ». Partant, « le dossier n’avait pas (…) à analyser les incidences des coupes de bois nécessaires au fonctionnement de la centrale (…) une telle évaluation relevant en tout état de cause de procédures distinctes prévues au code forestier ».

Ce raisonnement est censuré par le Conseil d’Etat qui juge que « l’appréciation de ces effets suppose que soient analysées dans l’étude d’impact non seulement les incidences directes sur l’environnement de l’ouvrage autorisé, mais aussi celles susceptibles d’être provoquées par son utilisation et son exploitation ».

En l’espèce, l’exploitation de la centrale repose sur la consommation de grandes quantités de bois provenant de ressources forestières locales. L’incidence de l’exploitation sur ces massifs forestiers devait donc nécessairement figurer dans l’étude d’impact. En estimant l’inverse, la cour administrative a commis une erreur de droit.

Le rapporteur public M. Stéphane Hoynck délimite la portée de cette solution dans ses conclusions en rappelant que le contenu de l’étude d’impact doit être en relation avec l’importance de l’installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l’environnement : « Cela ne signifie pas certainement pas que tout projet soumis à étude d’impact doive réaliser une évaluation de l’ensemble des incidences environnementales de l’ensemble des intrants qui servent à la fabrication et même au fonctionnement de l’installation ».

Cette solution est au demeurant parfaitement en accord avec la jurisprudence européenne. Dans un arrêt Paul Abraham 4)CJCE 28 février 2008 Paul Abraham, aff. C-2/07, la CJCE avait indiqué qu’ « il serait réducteur et contraire à [l’approche globalisante de la directive n°85/337] de ne prendre en considération, pour l’évaluation des incidences sur l’environnement d’un projet ou de sa modification, que les effets directs des travaux envisagés eux-mêmes, sans tenir compte des incidences sur l’environnement susceptibles d’être provoquées par l’utilisation et l’exploitation des ouvrages issus de ces travaux » conformément aux conclusions de l’avocat général suivant lesquelles « les mesures postérieures à la construction d’un terrain d’aviation peuvent également avoir des incidences notables sur l’environnement » Cette jurisprudence a été confirmée par la suite 5)CJUE 17 juin 2010 Terre wallone ASBL, aff. C-105/09, point 50.

 

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References   [ + ]

1. CAA Marseille 24 décembre 2020 Sté Uniper France Power, req. n°17MA03489, n°17MA03528
2. R. 512-8 c. env
3. R. 122-5 c. env
4. CJCE 28 février 2008 Paul Abraham, aff. C-2/07
5. CJUE 17 juin 2010 Terre wallone ASBL, aff. C-105/09, point 50

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