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CE 30 avril 2024, req. n° 472746
Les faits de la décision commentée étaient assez simples : Monsieur O, propriétaire d’un terrain à Dijon sur lequel se trouvait sa maison d’habitation, a souhaité agrandir cette dernière.
A cet effet, il a déposé une demande de permis de construire, qu’il a obtenu, en vue de la surélévation et de l’extension de cette maison. Ce permis n’ayant pas été contesté, il est devenu définitif.
En cours des travaux, un procès-verbal d’infraction a été établi par un agent de la commune poussant Monsieur O à solliciter la délivrance d’un permis de construire modificatif. Il a obtenu ce nouveau permis qui a été attaqué par des voisins.
Après avoir été déboutés par le Tribunal administratif de Dijon, lesdits voisins ont obtenu l’annulation du PCM dans un arrêt du 10 novembre 2022 rendu par la Cour administrative d’appel de Lyon.
En l’espèce, la Cour a fait une application de la jurisprudence Thalamy 1)CE 9 juillet 1986, Madame Thalamy, req. n° 51172. au permis modificatif en l’annulant au motif que le dossier de demande le concernant était incomplet en ce qu’il aurait dû faire mention des irrégularités relevées afin que les services instructeurs puissent apprécier si un permis modificatif était suffisant pour régulariser la situation ou si, à l’inverse, une nouvelle demande de permis de construire était nécessaire.
Pour mémoire, en vertu de la jurisprudence dite « Thalamy » lorsqu’une construction a fait l’objet d’une transformation irrégulière, c’est-à-dire sans autorisation, le propriétaire ne peut effectuer de nouveaux travaux qu’à condition que la demande de permis visant à autoriser le projet permette également de régulariser la transformation irrégulière.
La jurisprudence Thalamy concerne ainsi des travaux intervenant sur une construction existante irrégulière. Dans l’arrêt commenté, le Conseil d’Etat refuse de l’étendre aux constructions en cours par le biais du permis de construire modificatif.
Il rappelle en effet que l’administration dispose d’autres outils lui permettant de faire régulariser des travaux en cours, tels que la procédure visée aux articles L.461-1 et L.461-4 du code de l’urbanisme lui permettant de visiter les lieux accueillant des constructions et notamment réalisées en méconnaissance d’une autorisation et, le cas échéant, de de mettre en demeure le maître d’ouvrage d’avoir, dans un délai qui ne peut excéder six mois, à déposer une demande de permis de construire ou déclaration préalable de sorte à régulariser la situation administrative du bien.
En outre, l’article L.480-1 du code de l’urbanisme prévoit que l’administration, après avoir eu connaissance d’une telle infraction en transmet le constat sans délai au ministère public et peut, dans le même temps, ordonner l’interruption des travaux.
Le Conseil d’Etat mentionne enfin la procédure visée à article L.462-2 du code de l’urbanisme permettant à l’administration de procéder au récolement des travaux et, le cas échéant lorsqu’ils apparaissent non conformes à l’autorisation délivrée, de mettre en demeure le maître d’ouvrage de déposer un dossier modificatif ou de mettre en conformité la construction.
Il en résulte que l’administration « dispose, en cours d’exécution de travaux autorisés par un permis de construire, de la faculté de contrôler le respect de l’autorisation d’urbanisme ». Le Conseil d’Etat estime ainsi qu’à défaut de mise en œuvre de ces pouvoirs, « le pétitionnaire doit être considéré comme réalisant les travaux en se conformant à l’autorisation délivrée. L’autorité compétente ne peut pas exiger du pétitionnaire qui envisage de modifier son projet en cours d’exécution, que sa demande de permis modificatif porte également sur d’autres travaux, au motif que ceux-ci auraient été ou seraient réalisés sans respecter le permis de construire précédemment obtenu ». Il refuse ainsi d’étendre au permis modificatif le bénéfice de la jurisprudence Thalamy.
References
1. | ↑ | CE 9 juillet 1986, Madame Thalamy, req. n° 51172. |