Le coup d’arrêt du Conseil d’Etat au(x) référé(s) environnement !

Catégorie

Environnement

Date

April 2012

Temps de lecture

2 minutes

Dans une décision de section du 16 avril 2012 rendue sur conclusions contraires du rapporteur public, le Conseil d’Etat a conféré au juge des référés saisi d’une demande tendant à la suspension d’une décision prise après avis défavorable de la commission d’enquête publique le pouvoir « d’écarter à titre exceptionnel cette demande même si l’un des moyens invoqués paraît propre à créer en l’état de l’instruction un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ».

Cette position du Conseil d’Etat apparait tout à fait contraire à la lettre et à l’esprit de l’article L. 123-12 du code de l’environnement qui dispose : « Le juge administratif des référés, saisi d’une demande de suspension d’une décision prise après des conclusions défavorables du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête, fait droit à cette demande si elle comporte un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de celle-ci ».

Ainsi, comme l’avait déjà reconnu le Conseil d’Etat, la rédaction de cet article ne laisse planer aucun doute sur l’automaticité de la suspension en cas de réunion des conditions posées par le texte (CE 29 mars 2004 Commune de Soignolles en Brie, req. n° 258563 : mentionné aux tables du Rec. CE).

Pourtant en l’espèce tout en reconnaissant tant le caractère défavorable des conclusions de la commission d’enquête publique ainsi que l’existence non pas d’un mais de deux moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté portant modification du dispositif de circulation aérienne en région parisienne, le Conseil d’Etat refuse de faire droit à la demande de suspension au motif non justifié que ladite suspension « compromettrait la continuité et la sécurité du trafic aérien et porterait ainsi à l’intérêt général une atteinte d’une particulière gravité ».

Dans ses conclusions sous cet arrêt, le rapporteur public Damien Botteghi avait pourtant mis en garde la formation de jugement du Conseil d’Etat contre une utilisation abusive de son pouvoir juridictionnel et s’était opposé à l’introduction d’une exception jurisprudentielle sur le fondement de l’intérêt général dans le cadre du référé dit « environnement » en soulignant que la rédaction et l’intention du législateur étaient sans ambigüité sur l’automaticité de la suspension dans ce cadre.

Le rapporteur public, néanmoins soucieux de la protection des impératifs de sécurité juridique dans cette espèce, avait proposé en conséquence le prononcé d’une suspension de l’arrêté à effet différé de trois mois sur le modèle de la jurisprudence “Association AC” (CE Ass. 11 mai 2004 Association AC, req. n° 255886 : publié au Rec. CE).

On ne peut que regretter que cette approche innovante et conforme aux intentions du législateur n’ait finalement pas été retenue par le Conseil d’Etat et s’inquiéter du devenir d’autres référés spéciaux qui prévoient également une suspension automatique de décisions sous certaines conditions (voir par ex. notamment : le deuxième référé « environnement » de l’article L. 123-12 al. 2 et le référé suspension du déféré préfectoral de l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales).

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