Les règles d’urbanisme applicables sont différentes selon que le mur de clôture est incorporé ou non à une construction

Catégorie

Droit administratif général, Urbanisme et aménagement

Date

January 2020

Temps de lecture

4 minutes

CE 18 décembre 2019 M. A, req. n° 421644 : Mentionné dans les tables du recueil Lebon

1             Contexte

Par un arrêté du 16 mai 2014, le maire de Puivert (Aude) a refusé de délivrer à M. B…A le permis de construire une pergola et un mur de clôture sur la parcelle cadastrée section ZD n° 128 située lieu-dit « Prat de la Barthos » sur le territoire de cette collectivité.

Par un jugement 1)1403900. du 7 octobre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l’arrêté du 16 mai 2014 en tant qu’il refuse à M. B… une autorisation de réaliser un mur de clôture au motif que ce projet était exempté de toute formalité au sens du code de l’urbanisme.

La commune de Puivert a interjeté appel de ce jugement en tant qu’il annule le refus de délivrer un permis de construire pour le mur de clôture.

Par un arrêt 2)N° 16MA04655. du 20 avril 2018, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé le jugement dans cette mesure et rejeté la demande qui avait été présentée sur ce point par M. A… devant le tribunal administratif.

M.A… a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat et demande l’annulation de cet arrêt.

2             La décision du Conseil d’Etat

2.1          Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord le cadre juridique.

2.1.1      En premier lieu, il rappelle le champ d’application de autorisations d’urbanisme applicables.

En principe, en vertu du premier alinéa de l’article L. 421-1 du code de l’urbanisme :

« Les constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance d’un permis de construire ».

Toutefois, en raison de la faible importance de certaines constructions, un permis de construire n’est pas nécessairement exigé.

C’est ainsi que l’article L. 421-4 du même code prévoit que :

« Un décret en Conseil d’Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, en raison de leurs dimensions, de leur nature ou de leur localisation, ne justifient pas l’exigence d’un permis et font l’objet d’une déclaration préalable.

Ce décret précise les cas où les clôtures sont également soumises à déclaration préalable. »

Et l’article L. 421-5 renvoie également à un décret en Conseil d’Etat la fixation de « la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, par dérogation aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4, sont dispensés de toute formalité au titre du présent code en raison : a) De leur très faible importance ; (…) ».

C’est l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme qui indique que sont dispensés de tout formalité :

« sauf lorsqu’ils sont implantés dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques ou dans un site classé ou en instance de classement :

(…) f) Les murs dont la hauteur au-dessus du sol est inférieure à deux mètres, sauf s’ils constituent des clôtures régies par l’article R. 421-12 ;

g) Les clôtures, en dehors des cas prévus à l’article R. 421-12, ainsi que les clôtures nécessaires à l’activité agricole ou forestière».

Etant précisé que l’article R. 421-9 soumet à déclaration préalable les « murs dont la hauteur au-dessus du sol est supérieure ou égale à deux mètres ».

Quant à l’article R. 421-12 du même code, il soumet à déclaration préalable l’édification d’une clôture dans les périmètres qu’il énumère, tels :

  • les abords des monuments historiques définis à l’article L. 621-30 du code du patrimoine ;
  • ou dans un site inscrit ou dans un site classé ou en instance de classement en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l’environnement.

Le Conseil d’Etat indique qu’il résulte de ces dispositions qu’en dehors des périmètres énumérés à l’article R. 421-12, l’édification d’une clôture est dispensée de formalité au titre du code de l’urbanisme, sauf si elle prend la forme d’un mur d’une hauteur supérieure ou égale à deux mètres.

2.1.2      Après avoir rappelé les autorisations d’urbanisme exigées pour l’édification de clôtures et de murs, le Conseil d’Etat précise en second lieu les règles d’urbanisme applicables aux clôtures et murs.

Il souligne que l’article R. 151-41 du code de l’urbanisme dispose que, afin d’assurer l’insertion de la construction dans ses abords, la qualité et la diversité architecturale, urbaine et paysagère des constructions, ainsi que la mise en valeur du patrimoine, le règlement du plan local d’urbanisme peut « 2° prévoir des dispositions concernant les caractéristiques architecturales des façades et toitures des constructions ainsi que des clôtures ».

L’article R. 151-43 prévoit aussi que, afin de contribuer à la qualité du cadre de vie, assurer un équilibre entre les espaces construits et les espaces libres et répondre aux enjeux environnementaux, le règlement peut « 8° Imposer pour les clôtures des caractéristiques permettant de préserver ou remettre en état les continuités écologiques ou de faciliter l’écoulement des eaux ».

Le Conseil d’Etat en déduit que :

« sont applicables aux clôtures, dont celles qui prennent la forme d’un mur, les seules dispositions du règlement d’un plan local d’urbanisme édictées spécifiquement pour régir leur situation, sur le fondement des articles R. 151-41 et R. 151-43 du code de l’urbanisme. En revanche, un mur qui est incorporé à une construction, alors même qu’il a la fonction de clore ou limiter l’accès à son terrain d’assiette, est soumis à l’ensemble des règles du règlement du plan local d’urbanisme applicables aux constructions ».

2.2          En l’espèce, la cour administrative d’appel de Marseille avait relevé que le mur pour lequel a été demandée l’autorisation refusée par le maire de Puivert, est « un mur de clôture » constitué de parpaings d’une hauteur supérieure à 2 mètres.

En application des dispositions précitées, la réalisation du mur litigieux est donc bien soumise à autorisation.

Pour juger légal le refus opposé par le maire, la cour s’était fondée sur les dispositions de l’article 7 du règlement de la zone ULe du plan local d’urbanisme de la commune, aux termes desquelles :

« Toute construction nouvelle doit être implantée à une distance des limites séparatives de l’unité foncière au moins égale à la moitié de sa hauteur sans pouvoir être inférieure à 4 mètres ».

Ces dispositions ne sont pas spécifiques aux murs de clôtures.

La cour a donc fait application, au mur qu’elle qualifie de clôture, des dispositions du PLU relatives aux constructions.

Or, comme le Conseil d’Etat l’a rappelé précédemment, les clôtures (dont les murs) se voient en principe appliquer les dispositions spécifiques qui régissent leur situation en application des articles R. 151-41 et R. 151-43 du code de l’urbanisme, contrairement aux murs qui sont incorporés à une construction auxquels on applique l’ensemble des dispositions du PLU qui sont applicables aux constructions.

En conséquence, le Conseil d’Etat considère que la cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit, en faisant directement application des dispositions du PLU relatives aux constructions sans rechercher au préalable si le mur de clôture était incorporé à une construction.

L’affaire est renvoyée à la cour administrative de Marseille.

Partager cet article

References   [ + ]

1. 1403900.
2. N° 16MA04655.

3 articles susceptibles de vous intéresser