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CE 30 avril 2025 M. et Mme K… et autres, req. n° 490965 : mentionné aux tables du recueil Lebon
Par une décision du 30 avril 2025, le Conseil d’Etat a jugé que le vice affectant un document d’urbanisme, entachant les seules conclusions motivées du commissaire enquêteur, peut être régularisé par de nouvelles conclusions sans qu’il soit nécessaire de diligenter une nouvelle enquête publique.
Saisi d’un recours contre la délibération d’approbation de la révision d’un plan local d’urbanisme (ci-après « PLU »), le Conseil d’Etat est d’abord venu rappeler que si le commissaire enquêteur n’est pas tenu, en application des articles L. 123-1 et R. 123-19 du code de l’environnement, de répondre à chacune des observations présentées lors de l’enquête publique, il doit « indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis ».
Ce principe, qui résulte d’une jurisprudence constante de la Haute Juridiction 1)CE 21 février 1975 ministère de l’Intérieur, req. n° 91468 : au Rec. CE ; et plus récemment, CE 22 juillet 2020 Association Sauvegarde des Boutets, req. n° 428023 : mentionné aux T. du R. CE., a été assorti d’une précision complémentaire : le commissaire enquêteur ne peut « renoncer à se prononcer sur tout ou partie du projet, quand bien même certains éléments du projet soumis à enquête publique seraient concernés par une procédure contentieuse en cours à la date de son rapport ».
Au cas d’espèce, le commissaire enquêteur avait refusé de se prononcer sur les observations du public sur un secteur de la commune, au motif qu’une procédure contentieuse était en cours à l’encontre d’une délibération portant mise en compatibilité du PLU avec une opération d’aménagement.
Ensuite, le Conseil d’Etat a estimé, dans la droite ligne de la jurisprudence Danthony 2)CE 32 décembre 2011 Danthony, req. n° 335033 :au Rec. CE., que le refus de tenir compte des observations susvisées pour élaborer ses conclusions motivées sur le PLU soumis à enquête publique, a privé le public d’une garantie et a été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la délibération litigieuse, entachant ainsi d’illégalité la révision du PLU.
Néanmoins un tel vice de procédure est régularisable en application de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, qui permet au juge de sursoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation, dès lors que l’illégalité a eu lieu après le débat sur les orientations du projet d’aménagement et de développement durable.
Sur ce fondement, le Conseil d’Etat a indiqué que l’irrégularité pouvait être régularisée par l’adoption d’une nouvelle délibération approuvant le document d’urbanisme, « le cas échéant sur les seuls éléments entachés d’illégalité, dès lors que celle-ci répond aux exigences de forme ou a été précédée de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. ».
En outre, et c’est là l’apport majeur de cet arrêt, le Conseil d’Etat a précisé que, dès lors « le vice de procédure affectant le document d’urbanisme tient à une irrégularité intervenue après la clôture de l’enquête publique et entachant les seules conclusions motivées du commissaire enquêteur, il n’est pas nécessaire, pour régulariser la procédure d’adoption du document d’urbanisme, de diligenter une nouvelle enquête publique ».
Enfin, le Conseil d’Etat a énoncé la procédure à suivre, en indiquant qu’il appartiendra à l’autorité compétente de saisir le tribunal administratif compétent pour que soit désigné le commissaire enquêteur chargé de rendre à nouveau des conclusions motivées sur le projet en se fondant sur l’ensemble des éléments déjà recueillis à l’occasion de l’enquête publique déjà réalisée.
En l’espèce, le Conseil d’Etat a donc sursis à statuer sur l’appel des requérants jusqu’à l’expiration d’un délai de neuf mois à compter de la notification de sa décision, en vue de la notification de la mesure de régularisation.
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