Loi climat et résilience : focus sur les dispositions en matière d’urbanisme et de droit de l’environnement

Catégorie

Environnement, Urbanisme et aménagement

Date

September 2021

Temps de lecture

5 minutes

Par ses quelques 300 articles, la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « loi Climat et résilience », a pour ambition d’apporter une réponse à la hauteur de la situation d’urgence climatique liée au réchauffement planétaire.

Si l’imposant texte de loi modifie de nombreux pans du droit, le domaine de l’urbanisme et de l’environnement est largement mobilisé par certaines de ses mesures les plus emblématiques, notamment en matière de performance énergétique, de lutte contre l’artificialisation des sols ou encore de prise en compte de l’érosion littorale.

Voici donc un bref panorama des dispositions de la loi Climat et résiliation en matière d’urbanisme et de droit de l’environnement.

  • De nouvelles mesures en matière de performance énergétique (cf. articles 148 et suivants de la loi du 22 août 2021)

Le titre V de la loi du 22 août 2021, intitulé « Se loger », consacre plus d’une centaine d’articles à l’adaptation du droit de l’urbanisme et de la construction aux nouvelles contraintes liées à l’urgence climatique.

Plus spécifiquement, de nombreuses dispositions de la loi Climat et résilience ont pour objectif d’accélérer la rénovation des logements dans le but d’atteindre, d’ici 2050 la neutralité carbone grâce à un parc immobilier composé en grande majorité de logements de niveau basse consommation.

L’enjeu essentiel consiste en l’éradication des passoires thermiques.

Les propriétaires bailleurs de logements extrêmement consommateurs (classe G) ou très consommateurs d’énergie (classe F) sont ainsi fortement incités à s’atteler à la réalisation detravaux de rénovation énergétique. L’article 159 de la loi interdit par exemple toute augmentation de loyer pour les baux d’habitation conclus ou renouvelés, sur ce type de logements, à l’issue d’un délai d’un an suivant la publication de la loi. A compter du 1er janvier 2025, ces mêmes logements ne pourront plus être loués sous peine d’être qualifiés d’« indécents », entraînant des possibilités de recours pour le locataire et des sanctions pour le propriétaire.

Des prêts garantis par l’Etat seront accessibles aux ménages français, y compris les plus modestes, afin de les aider à financer leurs travaux de rénovation énergétique (cf. article 151 de la loi du 22 août 2021).

La loi Climat et résilience prévoit encore bien d’autres dispositifs, tels que la mise en place d’un réseau national d’accompagnateurs rénov’ (cf. article 171 de la loi du 22 août 2021) ou encore la création d’un carnet d’information du logement destiné à faciliter et accompagner les travaux d’amélioration de la performance énergétique du logement ainsi que l’installation d’équipements de contrôle et de gestion active de l’énergie (cf. article 167 de la loi du 22 août 2021).

  • L’entrée de la « zéro artificialisation nette » (ZAN) dans le code de l’urbanisme

L’article 191 de la loi du 22 août 2021 retranscrit l’engagement de la France au titre du zéro artificialisation nette (ci-après « ZAN ») d’ici 2050 :

Loi du 22 août 2021 – Article 191 : « Afin d’atteindre l’objectif national d’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050, le rythme de l’artificialisation des sols dans les dix années suivant la promulgation de la présente loi doit être tel que, sur cette période, la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale soit inférieure à la moitié de celle observée sur les dix années précédant cette date. Ces objectifs sont appliqués de manière différenciée et territorialisée, dans les conditions fixées par la loi ».

Forte de cette ambition, la loi fait figurer la lutte contre l’artificialisation des sols et le ZAN au nombre des objectifs généraux du droit de l’urbanisme détaillés à l’article L. 101-2 du Code de l’urbanisme.

Le nouvel article L. 101-2-1, intégré au code de l’urbanisme par la loi du 22 août 2021, précise que l’atteinte aux objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et de ZAN résulte de l’équilibre entre :

  • La maîtrise de l’étalement urbain,
  • Le renouvellement urbain,
  • L’optimisation de la densité des espaces urbanisés,
  • La qualité urbaine,
  • La préservation et la restauration de la biodiversité et de la nature en ville,
  • La protection des sols des espaces naturels, agricoles et forestiers,
  • La renaturation des sols artificialisés.

Cet article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme définit, en outre :

  • L’artificialisation comme l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ;
  • La renaturation d’un sol (ou désartificialisation) comme la restauration ou l’amélioration de sa fonctionnalité ayant pour effet de le transformer en sol non artificialisé ;
  • L’artificialisation nette des sols comme le solde de l’artificialisation et de la renaturation des sols constatées sur un périmètre et sur une période donnée.

Les objectifs de réduction de l’artificialisation des sols ou de son rythme sont fixés et évalués en considérant comme :

  • Artificialisés : une surface dont les sols sont soit imperméabilisés en raison du bâti ou d’un revêtement, soit stabilisés et compactés, soit constitués de matériaux composites ;
  • Non artificialisés : une surface soit naturelle, nue ou couverte d’eau, soit végétalisée, constituant un habitat naturel ou utilisée à usage de cultures.

Un décret en Conseil d’Etat viendra fixer les conditions d’application de cet article, notamment en établissant une nomenclature des sols artificialisés dans les documents de planification et d’urbanisme.

  • La mise en compatibilité des documents d’urbanisme

L’intégration dans le code de l’urbanisme des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et de réduction de la consommation des espaces naturels nécessitera l’adaptation des documents d’urbanisme si ceux-ci ne satisfont pas à ces nouvelles exigences.

Les délais dans lesquels les documents d’urbanisme devront être mis en compatibilité sont prévus à l’article 194 IV de la loi du 22 août 2021 :

  • L’évolution des SRADDET, PADDUC, SAR et SDRIF devra être engagée dans l’année de la promulgation de la loi, soit avant le 22 août 2022, pour une entrée en vigueur des documents modifiés dans les deux ans de cette promulgation, soit avant le 22 août 2023 ;
  • La mise en compatibilité des SCOT ou, en leur absence, des PLU, des documents en tenant lieu ou des cartes communales interviendra lors de leur première modification ou révision suivant l’adoption des documents supérieurs :
    • L’entrée en vigueur du SCOT modifié ou révisé devra intervenir dans un délai de 5 ans à compter de la promulgation de la loi, soit avant le 22 août 2026,
    • Pour les PLU et les cartes communales, le délai de mise en compatibilité est de 6 ans, soit avant le 22 août 2027 (passé ce délai, aucune autorisation d’urbanisme ne pourra être délivrée dans une zone à urbaniser du PLU ou une zone constructible de la carte communale jusqu’à ce qu’intervienne l’entrée en vigueur des documents modifiés ou révisés).

Par ailleurs, les collectivités ne pourront prévoir dans leur PLU ou leur carte communale l’ouverture à l’urbanisation de sols naturels, agricoles ou forestiers qu’en justifiant l’absence de parcelle disponible dans les espaces urbanisés (article 194 II, 4° et 5° de la loi du 22 août 2021).

  • De nouveaux outils à destination des communes du littoral confrontées au risque d’érosion côtière

La loi du 22 août 2021 met en place diverses mesures visant une meilleure prise en compte du phénomène de recul du trait de côte amplifié par le réchauffement climatique.

Ainsi, pour en citer quelques exemples, l’article 243 de la loi Climat et résilience prévoit l’adaptation du régime des documents d’orientation et d’objectifs (DOO) des SCOT, des projets d’aménagements et de développement durable (PADD) des PLUi, des emplacements réservés et des orientations d’aménagement et de programmation (OAP) de ces plans pour prendre en compte ce phénomène. L’article suivant, quant à lui, créé un droit de préemption dédié à l’acquisition des biens exposés à l’érosion littorale, qui prévaut sur les autres droits de préemption.

  • Et de nombreuses autres mesures

Les articles de la loi Climat et résilience touchant au droit de l’urbanisme ou à la protection de l’environnement sont nombreux.

Parmi les mesures mises en place, on trouve par exemple la constitution, par les EPCI dotés d’un programme local de l’habitat (PLH), d’observatoires de l’habitat et du foncier destinés, entre autres, à recenser les friches constructibles et les espaces de densification potentielle (cf. article 205 de la loi du 22 août 2021).  Les règles d’urbanisme sont également assouplies pour les constructions exemplaires en matière environnementale ou pour les projets de requalification des friches (cf. articles 209 et suivants de la loi du 22 août 2021). Enfin, l’article 215 de la loi interdit la délivrance d’une autorisation d’exploitation commerciale pour les projets entraînant une artificialisation des sols.

  • De nombreux textes à venir

De nombreux décrets d’application de ces mesures, plus d’une centaine a annoncé Barbara Pompili, sont attendus à court terme.

 

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