Lotissements : il n’est pas nécessaire de régulariser les divisions de terrains en deux lots intervenues avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2006-1527 du 8 décembre 2005 relatif aux permis de construire et autorisations d’urbanisme

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

June 2016

Temps de lecture

3 minutes

CE 20 mai 2016 commune de Montigny-les-Metz, req. n° 382976, 382977, mentionné dans les tables du Recueil CE.

Par arrêté du 10 juillet 2008, le maire de Montigny-les-Metz a accordé un permis de construire à une société de promotion immobilière sur plusieurs parcelles de terrain aux fins d’édifier une maison d’habitation composée de deux logements, autorisation qui a été complétée par la délivrance de deux permis modificatifs en date des 5 juillet 2010 et 5 mai 2011.

Ces autorisations ont été contestées par trois riverains qui en ont demandé l’annulation devant le tribunal administratif de Strasbourg. Celui-ci a rejeté les recours avant que la cour administrative d’appel de Nancy n’infirme la décision en faisant droit à quatre des moyens dont se prévalait l’un des requérants à l’encontre de ces permis.

La commune et la société ont formé un pourvoi alléguant, notamment, que la cour aurait commis une erreur de droit en considérant que l’opération d’aménagement relevait du régime des lotissements dès lors qu’elle avait pour effet de « permettre la réalisation d’une opération de construction sur ces deux parcelles formant un seul lot à construire » (CAA Nancy 22 mai 2014 Mme C., req. n° 12NC01346).

Il importe de préciser que la division du terrain litigieux avait été réalisée en 2006, soit antérieurement à l’entrée en vigueur des dispositions de l’ordonnance du 8 décembre 2005 qui avait modifié la définition des lotissements en prévoyant à l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme que ceux-ci se trouvaient constitués dès lors qu’une opération avait eu « pour effet la division d’une ou plusieurs propriétés foncières en vue de l’implantation d’un bâtiment ».

Sous l’empire des « anciennes » dispositions, seules les divisions dont étaient issus plus de deux lots étaient des lotissements (CE 21 juillet 1989 SCI « du moulin de Chabiague », req. n° 75176, mentionné dans les tables du recueil CE).

La cour avait écarté ces dispositions au profit des nouvelles, au motif qu’elles étaient celles applicables à la date de la demande de permis de construire déposée en 2008.

C’est le raisonnement que censure en l’espèce le Conseil d’Etat.

Après avoir constaté que les règles applicables à la demande de permis de construire étaient effectivement soumises l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme issue de l’ordonnance du 8 décembre 2005, la haute juridiction juge que « ces dispositions n’ont eu ni pour objet, ni pour effet de subordonner à une autorisation ou à une déclaration les divisions foncières opérées antérieurement à leur entrée en vigueur et qui n’étaient pas alors soumises à une telle autorisation ou déclaration ».

En conséquence, « en jugeant que la division en deux lots de la parcelle cadastrée n°10, destinée à permettre la réalisation d’une opération de construction sur le lot formé des parcelles cadastrées n°s 186 et 187, constituait à elle seule un lotissement soumis, en vertu des dispositions réglementaires prises pour l’application de l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme, à une déclaration préalable, alors même qu’elle avait relevé que cette division avait été effectuée en 2006, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de ces dispositions et à une date où une division en deux lots n’était pas constitutive d’un lotissement en vertu des dispositions précitées de l’article R* 315-1 du code de l’urbanisme, la cour a commis une erreur de droit ».

La décision apparaît logique : en considérant que le pétitionnaire aurait dû joindre à sa demande la déclaration préalable autorisant la division du terrain, l’arrêt de la cour a en effet appliqué rétroactivement une règle nouvelle à une situation révolue, et ce, alors même qu’à la date de la division en 2006, celle-ci était dispensée de tout formalité. Cela conduisait donc à, pour reprendre les termes du rapporteur public Jean Lessi, « sinon porter atteinte à des droits acquis, du moins remettre en cause, une situation définitivement constituée du point de vue de sa régularité (…) [et] faire basculer dans l’illégalité un opérateur qui avait pu légitimement s’abstenir de déclarer une opération régulière ».

L’arrêt confirme cependant la solution du juge d’appel dès lors que les trois autres motifs d’illégalité tirés de la méconnaissance du règlement du PLU de la commune étaient bien constitués en l’espèce.

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