Office du juge des référés en matière de sursis à statuer pour permettre la régularisation d’une autorisation d’urbanisme et point de départ du délai imparti au préfet pour déférer un autorisation d’urbanisme au juge administratif en cas de demande de compléments

Catégorie

Urbanisme et aménagement, Veille Adden

Date

June 2015

Temps de lecture

3 minutes

CE 22 mai 2015 Société Paolina, req. n°385183

La décision rendue par le Conseil d’Etat le 13 mars 2015 apporte d’utiles précisions quant à l’office du juge des référés en matière de sursis à statuer dans le cadre des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, et quant au point de départ du délai de recours imparti au préfet pour déférer une autorisation d’urbanisme au juge administratif en cas de demande de compléments.

Rappelons qu’en application de cet article, le « juge administratif », saisi de conclusions dirigées contre une autorisation d’urbanisme, peut surseoir à statuer, lorsque celui-ci estime qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible de régularisation, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés.

Dans cette affaire, par arrêté du 25 avril 2014, le maire de la commune de Furiani avait délivré un permis de construire à la société Paolina, en vue de réaliser un immeuble. Une ordonnance du tribunal administratif de Bastia a fait droit à la demande de suspension formulée par le préfet de Haute-Corse contre cet arrêté, laquelle a été attaquée devant le Conseil d’Etat.

Le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la société Paolina, et juge notamment que :

« Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme : « Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ” ; que, ainsi que l’a jugé le juge des référés, même dans l’hypothèse où le moyen de nature à créer un doute sérieux est relatif à une illégalité qui serait susceptible d’être régularisée en application de ces dispositions, il n’appartient pas, eu égard à son office, au juge des référés, qui statue en urgence, de faire usage des pouvoirs conférés au juge du fond par l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et de surseoir à statuer pour permettre au bénéficiaire de régulariser l’autorisation contestée ; que, par suite, l’ordonnance attaquée n’est pas entachée d’une erreur de droit sur ce point ».

Il ressort de cette décision que le juge des référés, lequel statue en urgence, ne peut faire usage des pouvoirs de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, réservés au juge du fond, et ce, y compris dans l’hypothèse où le moyen de nature à créer un doute sérieux est relatif à une illégalité qui serait susceptible d’être régularisée en application de ces dispositions.

Par ailleurs, dans cette même décision, le Conseil d’Etat rappelle qu’en cas de transmission incomplète des autorisations d’urbanisme en application des dispositions de l’article L. 424-7 du code de l’urbanisme, le délai de deux mois imparti au préfet pour déférer l’autorisation au juge administratif ne court qu’à compter de la réception des documents réclamés, ou de la décision implicite ou explicite par laquelle l’autorité compétente refuse de compléter la transmission initiale.

Au cas d’espèce, à la suite de la transmission au préfet du permis de construire en application des dispositions de l’article L. 421-2-4 du code de l’urbanisme (désormais L. 424-7), celui-ci a adressé au maire de Furiani une demande tendant à ce que le dossier relatif au permis de construire délivré à la société Paolina soit complété par la transmission des avis des collectivités territoriales de Corse et du Département de la Haute-Corse prévus par les articles R. 423-53 du code de l’urbanisme (du fait de la création d’accès sur la voie publique).

Le Conseil d’Etat juge que, dans ces circonstances, le juge des référés du Tribunal administratif de Bastia n’a pas commis d’erreur de droit estimant que la demande de production de pièces nécessaires à l’instruction du permis de construire était de nature à proroger le délai de deux mois dont le préfet disposait pour déférer le permis de construire litigieux au juge administratif.

En application de la jurisprudence, il en aurait sans doute été différemment si le maire avait décidé de compléter spontanément son envoi, sans demande du préfet 1) CE 17 octobre 2003 District de Bastia, req. n° 223296, dans le même sens, CE 29 octobre 2008 Commune de Sainte-Marie-aux-Mines, req. n° 273569., ou encore si le document demandé par le préfet n’était pas justifié 2) Voir, dans ce sens, CAA Nantes 18 avril 2013 Préfet des Côtes d’Armor, req. n°12NT01118.. Dans ces hypothèses en effet, le délai de deux mois imparti au préfet pour déférer l’autorisation au juge administratif n’est en principe pas prorogé.

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References   [ + ]

1. CE 17 octobre 2003 District de Bastia, req. n° 223296, dans le même sens, CE 29 octobre 2008 Commune de Sainte-Marie-aux-Mines, req. n° 273569.
2. Voir, dans ce sens, CAA Nantes 18 avril 2013 Préfet des Côtes d’Armor, req. n°12NT01118.

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