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CE 18 décembre 2024 Société Bouygues Telecom et autres, req. n°490274, mentionné dans les tables du recueil Lebon
Par cette décision rendue le 18 décembre 2024, le Conseil d’État a clarifié les règles relatives à la contribution des constructeurs aux dépenses d’équipements publics notamment pour les installations liées aux communications électroniques.
En l’espèce, la société Bouygues Telecom avait déposé une déclaration préalable pour la construction d’une antenne relais en zone agricole dans un secteur éloigné des zones urbanisées. Celle-ci nécessitait le raccordement et le renforcement du réseau public d’électricité existant pour fonctionner.
Le maire s’est opposé à cette déclaration préalable sur le fondement de l’article L. 111-11 du code de l’urbanisme aux termes duquel une autorisation d’urbanisme peut être refusée lorsque la demande porte sur un projet dont la réalisation requiert l’exécution de travaux sur les réseaux publics non prévus :
« Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l’aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d’eau, d’assainissement ou de distribution d’électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d’aménager ne peut être accordé si l’autorité compétente n’est pas en mesure d’indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. »
Le maire a alors estimé que les travaux ne pouvaient être mis à la charge du pétitionnaire -qui le proposait pourtant- et que la commune, n’entendait pas financer ces travaux de raccordement d’électricité.
La contestation de cette opposition a été portée devant le tribunal administratif puis la cour administrative d’appel, qui ont toutes deux rejeté les demandes du pétitionnaire.
La cour administrative d’appel a donné raison au maire en jugeant qu’il n’était pas en mesure d’indiquer un délai au sens de l’article L. 111-11 du code de l’urbanisme car il ne souhaitait pas financer les travaux. Elle a en outre considéré que le raccordement ne pouvait pas être mis à la charge du pétitionnaire sur le fondement de l’article L. 332-8 du même code, ce dernier n’apportant pas la preuve de l’importance de son projet.
En effet, cette dernière disposition permet pour les projets portant notamment sur des installations liées aux communications électroniques 1)L’article L. 332-8 du code de l’urbanisme vise : « les autorisations de construire qui ont pour objet la réalisation de toute installation à caractère industriel, notamment relative aux communications électroniques, agricole, commercial ou artisanal »., de contourner l’application de l’article L. 111-11 du Code de l’urbanisme, en autorisant le maire a délivré l’autorisation d’urbanisme en mettant à la charge du pétitionnaire le coût de la réalisation d’un « équipement public exceptionnel » nécessaire au projet :
« Une participation spécifique peut être exigée des bénéficiaires des autorisations de construire qui ont pour objet la réalisation de toute installation à caractère industriel, notamment relative aux communications électroniques, agricole, commercial ou artisanal qui, par sa nature, sa situation ou son importance, nécessite la réalisation d’équipements publics exceptionnels (…) ».
Le Conseil d’Etat invalide cette analyse en estimant à propos du champ d’application de l’article L. 332-8 du code de l’urbanisme que l’extension ou le renforcement du réseau d’électricité pour permettre l’implantation d’antennes relais est susceptible d’être regardé comme ayant le caractère d’un équipement public exceptionnel au sens de cette disposition « eu égard à la nature de l’opération, qui répond à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile, et à sa situation d’éloignement des zones desservies en électricité ».
Il en résulte pour le Conseil d’Etat que :
« Lorsqu’un pétitionnaire s’est engagé à prendre en charge le coût de travaux d’extension ou de renforcement du réseau de distribution d’électricité rendus nécessaires par l’implantation d’une infrastructure de téléphonie mobile et que ces travaux peuvent être légalement mis à sa charge en application des dispositions de l’article L. 332-8 du code de l’urbanisme, l’autorisation de construire l’infrastructure ne peut pas être refusée sur le fondement de l’article L. 111-11 du même code, sauf à ce qu’un motif autre que financier ne le permette. »
Le maire ne peut donc refuser une autorisation d’urbanisme si le pétitionnaire s’engage à prendre en charge le coût d’un équipement public qualifiable d’exceptionnel au sens de l’article L. 332-8 du code de l’urbanisme.
A cet égard, on retiendra l’analyse du rapporteur public qui estimait que l’importance du projet n’est pas une condition à l’application de l’article L. 332-8 : « il faut que l’équipement public soit rendu « nécessaire » par le projet en cause, et ce, non pas uniquement au regard de l’importance de ce dernier, mais également, et de manière alternative, de sa nature ou de sa situation. Autrement dit, il doit exister un lien de stricte nécessité entre le projet et l’équipement, la réalisation du second ne se justifiant que par l’existence du premier. »
References
1. | ↑ | L’article L. 332-8 du code de l’urbanisme vise : « les autorisations de construire qui ont pour objet la réalisation de toute installation à caractère industriel, notamment relative aux communications électroniques, agricole, commercial ou artisanal ». |