Précisions sur l’articulation entre les obligations de publicité et de mise en concurrence des marchés publics de services et les intérêts essentiels de la sécurité d’un Etat

Catégorie

Contrats publics

Date

October 2023

Temps de lecture

2 minutes

CJUE 7 septembre 2023 Commission européenne c/ République de Pologne, aff. C-601/21 

Par un arrêt de la première chambre du 6 septembre 2023, la CJUE précise la marge de manœuvre des Etats-membres pour aménager en droit national les exclusions des procédures de passation des marchés public.

En l’espèce, la Pologne en transposant la directive 2014/24 1)Directive 2014/24/UE du Parlement et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics avait introduit dans sa législation nationale diverses exclusions de son champ d’application concernant les marchés de services de production de documents sensibles pour la sécurité nationale (documents d’identité, bulletins de vote, titres exécutoires, etc.).

Une telle exclusion, non prévue par la directive qui du reste prévoit déjà des exceptions, conduisait donc à en restreindre le champ d’application.

Estimant cette sur-transposition contra legem, la Commission, après l’échec d’une procédure précontentieuse a introduit un recours devant la CJUE.

Devant la Cour, la Pologne fait valoir que la sécurité de ces documents est étroitement liée à ses intérêts fondamentaux, à savoir tant les intérêts internes comprenant la sécurité, la santé et la liberté des citoyens ainsi que le respect de l’ordre public que les intérêts transfrontaliers comprenant la protection de la vie, de la santé et des libertés des citoyens ainsi que la prévention du terrorisme, de la traite des êtres humains et de la criminalité organisée (point 42).

La Cour commence par rappeler que les mesures que les États membres adoptent dans le cadre des exigences légitimes d’intérêt national ne sont pas soustraites dans leur ensemble à l’application du droit de l’Union du seul fait qu’elles interviennent dans l’intérêt de la sécurité nationale 2)CJUE 20 mars 2018 Commission européenne contre République d’Autriche, aff. C‑187/16.

Elle relève ensuite que les seules exceptions permises à la directive 2014/24 sont celles qui y sont limitativement et expressément mentionnées, ce qui la conduit à juger que la protection de la sécurité des documents concernés et, plus précisément, des informations qu’ils contiennent n’empêche pas en ellemême de recourir à une procédure de mise en concurrence pour l’attribution d’un marché public.

La Cour valide néanmoins une partie des exceptions introduite par le droit polonais, mais considère en majeure partie que l’Etat n’a pas démontré que la protection requise, y compris la protection contre la falsification ou en lien avec les dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel, ne pouvait pas être assurée dans le cadre de la procédure de passation de marchés publics classiques telle prévue par la directive 2014/24.

En clair, elle juge que les restrictions nationales aux obligations de publicité et de mise en concurrence doivent puiser dans les dérogations existantes et prévues par la directive 2014/24.

 

 

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References   [ + ]

1. Directive 2014/24/UE du Parlement et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics
2. CJUE 20 mars 2018 Commission européenne contre République d’Autriche, aff. C‑187/16

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