Précisions sur les éléments de nature à justifier le refus de communication aux candidats évincés des caractéristiques et avantages relatifs à l’offre retenue

Catégorie

Contrats publics

Date

July 2013

Temps de lecture

3 minutes

CE 29 mai 2013 ministre de la Défense c/ société Aéromécanic, req. n° 364827

Par un avis d’appel public à la concurrence publié au JOUE, la structure intégrée de maintien en conditions opérationnelles des matériels aéronautiques du ministère de la défense (SIMMAD) a lancé une procédure de passation pour un marché négocié relatif aux visites d’entretien des hélicoptères « Puma » de l’armée française.

Pour une raison pratique, la SIMMAD a décidé de ne pas envoyer les plans des hélicoptères, les documents étant volumineux. Néanmoins, il était proposé aux candidats de venir consulter la documentation technique au sein de l’Equipe Technique Interarmées à Montauban au cours de la semaine 14 de la consultation ou de solliciter un rendez-vous pendant une autre période.

La société Aéromatic, candidat évincé, a formé un référé précontractuel devant le tribunal administratif de Versailles pour demander l’annulation de l’intégralité de la procédure de passation pour le lot n°1.

Le juge des référés fait droit à sa demande, considérant que l’absence de transmission des plans était une violation des obligations de publicité et de mise en concurrence inhérentes à la passations des marchés publics.

Le ministre de la défense s’est pourvu devant le Conseil d’Etat qui a annulé la décision du premier juge en considérant que :

« […] le pouvoir adjudicateur doit adresser aux candidats les documents de la consultation nécessaires à l’élaboration de leurs offres ; que, toutefois, ces dispositions n’ont ni pour objet ni pour effet d’interdire au pouvoir adjudicateur d’inviter les candidats à venir consulter sur site des documents nécessaires à l’élaboration de leurs offres mais qui ne peuvent leur être adressés en raison, notamment, de leur volume ou de leur confidentialité ; qu’ainsi le juge des référés a commis une erreur de droit en annulant la procédure de passation du marché litigieux au motif que la SIMMAD avait méconnu les dispositions du 1° du I de l’article 244 citées ci-dessus en n’adressant pas aux candidats le plan d’entretien des hélicoptères ” Puma “, nécessaire à l’élaboration de leurs offres, et en leur offrant seulement la possibilité de le consulter sur place, dans les locaux de l’équipe technique interarmées à Montauban, sans rechercher si, comme le soutenait le ministre en défense, les documents constituant le plan d’entretien de ces hélicoptères ne pouvaient être communiqués directement aux candidats en raison de leur volume et des règles de confidentialité qui les protégeaient ; que, dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, l’ordonnance attaquée doit être annulée […] ».

Sur le fond, et c’est là tout l’intérêt de l’arrêt, le Conseil d’Etat se prononce sur l’application de l’alinéa 2 de l’article 255 du code des marchés publics relatif à la communication aux candidats évincés des caractéristiques et des avantages de l’offre retenue.

Rappelons que l’article 255 édicte ;

« La personne soumise à la présente partie communique à tout candidat écarté qui n’a pas été destinataire de la notification prévue au 1° du I de l’article 253 les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre dans les quinze jours de la réception d’une demande écrite à cette fin.

Si le candidat a vu son offre écartée alors qu’elle n’était aux termes de l’article 208 ni inappropriée, ni irrégulière, ni inacceptable, la personne soumise à la présente partie est en outre tenue de lui communiquer les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom du ou des attributaires du marché ou de l’accord-cadre. »

La SIMMAD a refusé, sans apporter aucune justification de nature, notamment, à établir une atteinte au secret industriel et commercial, de communiquer à la société Aeromécanic les délais d’exécution et le prix global de l’offre de la société Sabena Technics DNR, qui constituaient des éléments faisant l’objet de critères de sélection des offres.

Le Conseil d’Etat considère qu’en agissant ainsi elle a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence et décide d’enjoindre à la SIMMAD de communiquer à la société Aeromécanic, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de son arrêt, les délais d’exécution et le prix global de l’offre de la société Sabena Technics DNR, sauf à établir qu’une telle communication porterait atteinte au secret des affaires, et, d’autre part, de surseoir à statuer sur les conclusions de la société Aeromécanic tendant à l’annulation de la procédure.

C’est l’intérêt de l’arrêt commenté qui est ainsi fiché aux Tables du Recueil du Conseil d’Etat :

« En soutenant que la communication d’informations relatives aux caractéristiques et avantages relatifs de l’offre retenue à un candidat évincé, exigée par l’article 255 du code des marchés publics (CMP), risquerait de donner à ce dernier un avantage compétitif de nature à nuire à la loyauté de la concurrence, dans l’hypothèse où la procédure litigieuse serait annulée par le Conseil d’Etat ou serait déclarée sans suite pour motif d’intérêt général et où une nouvelle procédure de passation du marché serait engagée, le pouvoir adjudicateur n’apporte aucun élément de nature à établir que la communication des informations demandées porterait, en l’espèce, une atteinte au secret des affaires ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre les opérateurs économiques et à faire ainsi obstacle à ce qu’il y soit procédé. »

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