Taxe foncière – Un terrain enclavé peut être considéré comme constructible au sens de l’article 1396 du CGI et être sujet à une majoration de la valeur locative des terrains constructibles situés dans les zones urbanisées ou à urbaniser prévue à cet article

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

June 2021

Temps de lecture

4 minutes

CE 28 mai 2021 M. A…, req. n° 440265

Par un avis d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre de l’année 2017, Monsieur A, propriétaire de quatre parcelles, s’est vu notifier une majoration de la valeur locative cadastrale des terrains constructibles fixée à 3 euros par mètre carré.

Après rejet par l’administration fiscale le 7 février 2018 de sa réclamation visant à obtenir l’annulation de cette majoration en raison de l’inconstructibilité de ses parcelles, Monsieur A a saisi le tribunal administratif de Toulouse en vue d’obtenir l’annulation pour excès de pouvoir de cet avis d’imposition, l’annulation de la décision par laquelle le maire de la commune avait qualifié ces parcelles de terrains constructibles au sens de l’article 1396 du code général des impôts et le prononcé de la réduction de cette cotisation de taxe foncière sur les propriétés non bâties à concurrence de la majoration prévue par l’article 1396 du code général des impôts.

Par un jugement du 17 mars 2020, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande de réduction de cotisation sur deux des quatre parcelles concernées mais a rejeté le surplus de sa demande. Alors que les deux premières parcelles, jouxtant le cimetière communal, étaient entièrement incluses dans une bande de 20 mètres à l’intérieur de laquelle aucune construction nouvelle ne pouvait être implantée en vertu des dispositions du PLU, le tribunal administratif a considéré que les deux autres parcelles, bien qu’enclavées, pourraient être rendues accessibles et donc constructibles par l’instauration d’une servitude de passage.

Monsieur A s’est donc pourvu devant le Conseil d’Etat contre ce jugement 1)Aux termes de l’article R. 811-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort « 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n’excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ». Le montant déterminé par l’article R. 222-14 est de 10 000 euros. Or, au cas présent, comme l’avait souligné le rapporteur public : « La portée financière du litige est modeste. Elle est circonscrite à la majoration appliquée aux parcelles n° 183 et n° 191 (…) soit un quantum de 2 690 € ». La voie de l’appel était donc fermée et seul un pourvoi en cassation pouvait être introduit..

Le Conseil d’Etat rappelle d’abord qu’aux termes de l’article 1393 du code général des impôts « la taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés non bâties de toute nature sises en France, à l’exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ».

Il relève ensuite que selon l’article 1396 du même code, aux termes duquel « la taxe foncière sur les propriétés non bâties est établie d’après la valeur locative cadastrale de ces propriétés », dans les communes autres que celles mentionnées au I de l’article 232 2)Il s’agit des « communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social ». ou au premier alinéa du I de l’article 234 3)Il s’agit des « communes classées dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre particulièrement important entre l’offre et la demande de logements ». « la valeur locative cadastrale des terrains constructibles situés dans les zones urbaines ou à urbaniser, lorsque les voies publiques et les réseaux d’eau, d’électricité et, le cas échéant, d’assainissement existant à la périphérie de la zone à urbaniser ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l’ensemble de cette zone, délimitées par une carte communale, un plan local d’urbanisme, un document d’urbanisme en tenant lieu ou un plan de sauvegarde et de mise en valeur approuvé conformément au code de l’urbanisme, peut, sur délibération du conseil municipal prise dans les conditions prévues au premier alinéa du I de l’article 1639 A bis, être majorée d’une valeur forfaitaire comprise entre 0 et 3 € par mètre carré pour le calcul de la part revenant aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale sans fiscalité propre (…) “.

Par conséquent, le Conseil d’Etat juge que cette majoration de la valeur locative retenue pour l’établissement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties peut trouver à s’appliquer sur les terrains situés en zone U ou AU du document d’urbanisme applicable si les terrains sont équipés de voies publiques et de réseaux d’eau et d’électricité suffisants pour desservir les constructions devant y être implantées. A l’inverse les terrains insusceptibles de recevoir une construction sont exclus de cette majoration.

Le Conseil d’Etat ajoute alors qu’eu égard au droit de passage sur les fonds voisins que prévoit l’article 682 du code civil pour garantir un accès à la voie publique des fonds enclavés 4)En effet, aux termes de l’article 682 du code civil « Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue, ou qu’une issue insuffisante, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner »., la seule circonstance qu’un terrain soit enclavé n’est pas de nature à faire obstacle à l’application de la majoration.

Ainsi, la circonstance qu’une disposition du règlement du PLU s’oppose à la constructibilité d’un terrain enclavé sauf à ce que le propriétaire ne produise une servitude de passage instituée par acte authentique ou par voie judiciaire en application de l’article 682 du code civil, ne fait pas obstacle à ce que les parcelles du requérant situées en zone constructible du PLU mais dépourvues d’un accès direct à la voie publique puissent néanmoins être considérées comme constructibles au sens de l’article 1396 du CGI et donc être assujetties à la majoration de la valeur locative foncière des terrains constructibles non bâtis prévue par ce même article.

Le pourvoi du requérant est dès lors rejeté.

 

 

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1. Aux termes de l’article R. 811-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort « 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n’excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ». Le montant déterminé par l’article R. 222-14 est de 10 000 euros. Or, au cas présent, comme l’avait souligné le rapporteur public : « La portée financière du litige est modeste. Elle est circonscrite à la majoration appliquée aux parcelles n° 183 et n° 191 (…) soit un quantum de 2 690 € ». La voie de l’appel était donc fermée et seul un pourvoi en cassation pouvait être introduit.
2. Il s’agit des « communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social ».
3. Il s’agit des « communes classées dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre particulièrement important entre l’offre et la demande de logements ».
4. En effet, aux termes de l’article 682 du code civil « Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue, ou qu’une issue insuffisante, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner ».

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