Validation par le Conseil d’Etat de la procédure négociée d’un marché global de prestations de « médiation de nuit »

Catégorie

Contrats publics

Date

April 2015

Temps de lecture

4 minutes

CE 27 mars 2015 association Optima, req. n° 386862

La commune d’Arcueil avait lancé, dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres ouvert, une consultation pour l’attribution d’un marché portant sur des prestations de « médiation de nuit ». Deux candidats y avaient répondu, l’association Optima et la société Groupe Progard France.

Les offres avaient toutefois été considérées comme inacceptables par la commune, dès lors qu’elles excédaient les crédits budgétaires alloués au marché. La commune d’Arcueil avait alors engagé une procédure négociée en application des dispositions du I-1° de l’article 35 du code des marchés publics 1) Article 35 du code des marchés publics : « Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer des marchés négociés dans les cas définis ci-dessous. / I. Peuvent être négociés après publicité préalable et mise en concurrence : 1° Les marchés et accords-cadres pour lesquels, après appel d’offres ou dialogue compétitif, il n’a été proposé que des offres irrégulières ou inacceptables que le pouvoir adjudicateur est tenu de rejeter. (…) Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de le financer. / Les conditions initiales du marché ne doivent toutefois pas être substantiellement modifiées. / Le pouvoir adjudicateur est dispensé de procéder à une nouvelle mesure de publicité s’il ne fait participer à la négociation que le ou les candidats qui, lors de la procédure antérieure, ont soumis des offres respectant les exigences relatives aux délais et modalités formelles de présentation des offres (…) »..

A l’issue de cette nouvelle procédure, l’association Optima avait été retenue. La société Groupe Progard France avait alors saisi, en vertu des dispositions de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif de Melun d’un référé précontractuel, aux fins d’annuler la procédure de passation du marché.

Par une ordonnance du 17 décembre 2014, le tribunal faisait droit à la demande de la société en considérant que l’offre de l’association Optima était inacceptable au motif qu’elle avait méconnu les dispositions des articles L. 611-1 2) Article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : « Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu’elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par systèmes électronique de sécurité ou de gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles (…) ». , L. 612-1 3) Article L. 612-1 du code de la sécurité intérieure : « Seules peuvent être autorisées à exercer à titre professionnel, pour elles-mêmes ou pour autrui, les activités énumérées aux 1° à 3° de l’article L. 611-1 (…) : 1° Les personnes physiques ou morales enregistrées au registre du commerce et des sociétés (…) ». et L. 612-6 4) Article L. 612-6 du code de la sécurité intérieure : « Nul ne peut exercer à titre individuel une activité mentionnée à l’article L. 611-1, ni diriger, gérer ou être l’associé d’une personne morale exerçant cette activité, s’il n’est titulaire d’un agrément délivré selon les modalités définies par décret en Conseil d’Etat. ». du code de la sécurité intérieure dès lors que l’activité de « médiation de nuit » comportait des missions de sécurisation des personnes et des biens. En effet, de telles prestations ne pouvaient être réalisées que par une personne inscrite au registre du commerce et des sociétés et bénéficiant d’un agrément administratif, ce qui n’était pas le cas de l’association Optima.

Saisi d’un pourvoi contre cette ordonnance par l’association Optima, le Conseil d’Etat, après avoir censuré le raisonnement du juge des référés, a toutefois validé la procédure de passation du marché conclu entre la commune d’Arcueil et l’association.

Le Conseil d’Etat a, dans un premier temps, annulé l’ordonnance rendue par le tribunal administratif de Melun. L’activité de « médiation de nuit » prévue par le marché en cause n’incluait pas, contrairement à ce qu’a jugé le juge des référés, des missions de sécurisation des personnes et des biens et était donc exclue des dispositions précitées du code de la sécurité intérieure. En l’occurrence, il ne s’agissait que de missions de renforcement des relations avec et entre les habitants de la commune d’Arcueil et de prévention d’éventuels conflits.

Dans un second temps, évoquant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat a examiné la validité de la procédure de négociation mise en œuvre par la commune d’Arcueil. Rejetant l’ensemble des moyens soulevés par la société Groupe Progard France devant le tribunal, le Conseil d’Etat a considéré que le contrat de prestations de « médiation de nuit » avait effectivement été passé conformément aux obligations de publicité et de mise en concurrence.

Tout d’abord, le Conseil d’Etat rappelle que « dans le cadre d’une procédure négociée, le pouvoir adjudicateur détermine librement les modalités de discussion des offres mais ne peut engager la négociation avec plusieurs des candidats que dans le respect du principe d’égalité de traitement » 5) Voir en ce sens, sur la libre détermination des modalités de négociation : CE 11 août 2009 société Val’Horizon, req. n° 325465.. En l’occurrence, la circonstance notamment que les négociations n’aient pas été très développées et que les documents de la consultation restaient inchangés était sans influence sur la validité de la procédure dès lors que les deux candidats avaient été traités de la même manière quant à la présentation de leurs nouvelles offres.

Ensuite, il convient de relever que le Conseil d’Etat a admis l’opérance, dans le cadre du référé précontractuel, du moyen relatif à la méconnaissance de l’article 46 du code des marchés publics et tenant à l’obligation, pour le candidat auquel il est envisagé d’attribuer le marché, d’établir qu’il est à jour de ses obligations fiscales et sociales avant la signature du marché. En l’espèce, ce moyen manquait en fait.

Enfin, notons que le marché de prestations de « médiation de nuit » a été qualifié, en l’espèce, de marché global puisqu’il ne permettait pas l’identification de prestations distinctes, rejetant ainsi toute méconnaissance du principe de l’allotissement consacré par l’article 10 du code des marchés publics.

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1. Article 35 du code des marchés publics : « Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer des marchés négociés dans les cas définis ci-dessous. / I. Peuvent être négociés après publicité préalable et mise en concurrence : 1° Les marchés et accords-cadres pour lesquels, après appel d’offres ou dialogue compétitif, il n’a été proposé que des offres irrégulières ou inacceptables que le pouvoir adjudicateur est tenu de rejeter. (…) Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de le financer. / Les conditions initiales du marché ne doivent toutefois pas être substantiellement modifiées. / Le pouvoir adjudicateur est dispensé de procéder à une nouvelle mesure de publicité s’il ne fait participer à la négociation que le ou les candidats qui, lors de la procédure antérieure, ont soumis des offres respectant les exigences relatives aux délais et modalités formelles de présentation des offres (…) ».
2. Article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : « Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu’elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par systèmes électronique de sécurité ou de gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles (…) ».
3. Article L. 612-1 du code de la sécurité intérieure : « Seules peuvent être autorisées à exercer à titre professionnel, pour elles-mêmes ou pour autrui, les activités énumérées aux 1° à 3° de l’article L. 611-1 (…) : 1° Les personnes physiques ou morales enregistrées au registre du commerce et des sociétés (…) ».
4. Article L. 612-6 du code de la sécurité intérieure : « Nul ne peut exercer à titre individuel une activité mentionnée à l’article L. 611-1, ni diriger, gérer ou être l’associé d’une personne morale exerçant cette activité, s’il n’est titulaire d’un agrément délivré selon les modalités définies par décret en Conseil d’Etat. ».
5. Voir en ce sens, sur la libre détermination des modalités de négociation : CE 11 août 2009 société Val’Horizon, req. n° 325465.

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