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CE 27 septembre 2024 région Guadeloupe, req. n° 490697
Par un arrêt rendu le 27 septembre 2024, le Conseil d’Etat précise que le délai écoulé entre la décision d’attribution du marché et l’information d’un candidat évincé du rejet de son offre n’est pas susceptible, à lui seul, de constituer un manquement de l’acheteur à ses obligations de transparence et de mise en concurrence.
Le juge précisait déjà dans un arrêt CE 6 mars 2009 Syndicat mixte de la région d’Auray Belz Quiberon, req.n° 321217 la finalité de l’obligation d’information des motifs de rejet d’une offre. Elle a notamment pour objet de permettre de contester utilement le rejet de l’offre opposé au candidat évincé devant le juge du référé précontractuel. De ce fait, il n’y a pas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence si l’ensemble des informations a été communiqué au candidat évincé à la date à laquelle le juge des référés statue, et si le délai qui s’est écoulé entre cette communication et la date à laquelle le juge statue a été suffisant pour permettre à ce candidat de contester utilement son éviction.
En l’espèce, la commission d‘appel d’offres de la région Guadeloupe a attribué un marché public de travaux à un groupement. A l’appui d’un référé-précontractuel, le candidat évincé demande au juge d’enjoindre la région de lui communiquer sans délai les détails des notes attribuées, les explications littérales accompagnant ces notes et les caractéristiques des avantages de la proposition retenue et il demande l’annulation de la procédure de passation du marché.
Ici, la région a communiqué sa décision d’attribution au concurrent évincé quinze mois après la réunion de la commission d’appel d’offres. Par ordonnance du 21 décembre 2023, le juge des référés a considéré que l’acheteur a commis un manquement en ne communiquant au concurrent évincé sa décision concernant l’attributaire tardivement. La région demande au Conseil d’Etat l’annulation de l’ordonnance.
Le Conseil d’Etat rappelle les dispositions des articles L. 2181-1 du code de la commande publique, R. 2181-1, R. 2181-3 et R. 2181-4 du même code relatives à l’obligation d’information.
Il résulte de ces dispositions une obligation pour l’acheteur de :
- communiquer son choix aux candidats et aux soumissionnaires dont la candidature ou l’offre n’a pas été retenue
- notifier sans délai à chaque candidat ou soumissionnaire sa décision de rejeter sa candidature ou son offre
- mentionner dans cette notification les motifs du rejet de la candidature ou de l’offre ; lorsque la notification de rejet intervient après l’attribution du marché, communiquer le nom de l’attributaire ainsi que les motifs qui ont conduit au choix de son offre et la date à compter de laquelle il est susceptible de signer le marché
- à la demande de tout soumissionnaire ayant remis une offre qui n’a pas été rejetée au motif qu’elle est irrégulière, inacceptable ou inappropriée, communiquer dans les meilleurs délais et au plus tard quinze jours à compter de la réception de la demande :
- lorsque les négociations ou le dialogue ne sont pas encore achevés, les informations relatives au déroulement et à l’avancement des négociations ou du dialogue
- lorsque le marché a été attribué, les caractéristiques et les avantages de l’offre retenue.
C’est dans ce contexte que le Conseil d’Etat rappelle l’objectif de ces règles :
« L’information sur les motifs du rejet de son offre dont est destinataire l’entreprise en application des dispositions précitées a, notamment, pour objet de permettre à la société non retenue de contester utilement le rejet qui lui est opposé devant le juge du référé précontractuel saisi en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative. Par suite, l’absence de respect de ces dispositions constitue un manquement aux obligations de transparence et de mise en concurrence. Cependant, un tel manquement n’est plus constitué si l’ensemble des informations, mentionnées aux articles du code de la commande publique précédemment cités, a été communiqué au candidat évincé à la date à laquelle le juge des référés statue sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, et si le délai qui s’est écoulé entre cette communication et la date à laquelle le juge des référés statue a été suffisant pour permettre à ce candidat de contester utilement son éviction. ».
Or, le juge estime qu’il ne résulte ni des dispositions précitées, ni de la finalité de la communication des motifs de rejet de l’offre que le délai écoulé entre la décision d’attribution du marché et l’information d’un candidat évincé du rejet de son offre serait susceptible, à lui seul, de constituer un manquement de l’acheteur à ses obligations de transparence et de mise en concurrence.
Par conséquent, le Conseil d’Etat estime qu’aucun manquement n’a été commis et annule l’ordonnance du 21 décembre 2023 du juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe.