Appréciation in concreto de l’intérêt à agir d’une association de protection de l’environnement contre un permis de construire en confrontant les statuts et le projet

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

May 2022

Temps de lecture

3 minutes

CE 12 avril 2022 Association vivre l’ile 12/12, req n° 451778 : mentionné aux tab.Rec

Par une décision en date du 12 avril 2022 le Conseil d’État contrôle de façon restrictive l’intérêt à agir des associations de défense de l’environnement en confrontant ses statuts à l’autorisation de construire attaquée.

En l’espèce, la commune de Noirmoutier avait délivré un permis de construire et de démolir à des particuliers pour la construction d’une maison individuelle dans une zone urbanisée.

Estimant les intérêts qu’elle défend lésés et après quelques tumultes procéduraux, l’association s’étant d’abord désisté de son recours pour ensuite présenter un mémoire en intervention volontaire en soutien de la requête, des riverains ont formé un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif de Nantes aux fins d’annulation du permis.

Le tribunal administratif de Nantes a, par une ordonnance du 9 juillet 2019, rejeté la demande des requérants. L’association de défense de l’environnement qui intervenait en soutien de la requête en première instance a interjeté appel. Par un arrêt rendu le 16 février 2021, la cour administrative d’appel de Nantes a fait droit à la demande de l’association en annulant le permis.

Les pétitionnaires s’étant pourvu en cassation, le Conseil d’État avait à statuer sur l’intérêt à agir de l’association.

Le Conseil d’État commence par rappeler qu’en principe « un désistement a le caractère d’un désistement d’instance. Il n’en va autrement que si le caractère de désistement d’action résulte sans aucune ambiguïté des écritures du requérant. Par voie de conséquence, lorsque le dispositif d’une décision de justice qui donne acte d’un désistement ne comporte aucune précision sur la nature du désistement dont il est donné acte, ce désistement doit être regardé comme un désistement d’instance ». Ainsi ce désistement ne fait pas obstacle à ce que cette même partie présente un mémoire en soutien d’une autre demande ayant pour objet la même action.

Ensuite, la question se posait aux juges du Palais-Royal de savoir si une association, ou tout autre personne, intervenant à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir exercé par une tierce personne, pouvait interjeter appel du jugement ayant tranché défavorablement à ses conclusions. La jurisprudence est constante sur ce point depuis l’affaire « Sieur de Harenne » 1)CE Sect. 9 janvier 1959 Sieur de Harenne, req. N° 41383, Rec. CE p.23. Les juges reprennent donc ici le considérant de principe selon lequel « la personne qui, devant le tribunal administratif, est régulièrement intervenue à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir n’est recevable à interjeter appel du jugement rendu contrairement aux conclusions de son intervention que lorsqu’elle aurait eu qualité pour introduire elle-même le recours. ».

Enfin, reste la question de l’intérêt à agir de l’association.

Sur ce point, de manière générale, la recevabilité d’un recours d’une association doit résulter de la satisfaction d’un critère dit de spécialité de l’objet, impliquant un lien entre l’objet statutaire de l’association et l’acte attaqué 2)CE 29 janvier 2003 req n°199692 : Rec. T. CE . En l’espèce, le Conseil d’Etat estime que l’association « Vivre l’ïle 12/12 » n’a pas intérêt à agir contre le permis, au regard de ses statuts à « assurer la protection de la nature et de l’environnement de l’île de Noirmoutier, de sauvegarder sa flore, sa faune, ses réserves naturelles, en tenant compte du milieu dont elles dépendent, de veiller au bon équilibre des intérêts humains, sociaux, culturels, scientifiques, économiques, sanitaires et touristiques “.

Le permis attaqué porte sur une maison individuelle dans une zone déjà urbanisée. Ainsi, il n’induit pas de conséquences particulières sur l’environnement, la flore, la faune, les réserves naturelles…. Les dispositions statutaires de l’association ne lui auraient donc pas permis d’ester contre le permis de construire en première instance, ainsi, l’appel est irrecevable.

 

 

 

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References   [ + ]

1. CE Sect. 9 janvier 1959 Sieur de Harenne, req. N° 41383, Rec. CE p.23
2. CE 29 janvier 2003 req n°199692 : Rec. T. CE

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