Le Conseil d’Etat enterre définitivement les accords-cadres sans maximum

Catégorie

Contrats publics

Date

February 2022

Temps de lecture

3 minutes

CE 28 janvier 2022 communauté de communes Convergence Garonne, req. n° 456418

Par sa décision communauté de communes Convergence Garonne, le Conseil d’Etat se prononce pour la première fois sur les conséquences de l’arrêt Simonsen Weel A/S rendu par la CJUE en juin dernier 1)CJUE 17 juin 2021 Simonsen Weel A/S, n° C-23/20 : c’est la fin des accords-cadres sans maximum de quantité ou de montant des prestations.

Dans cette affaire, la communauté de communes Convergence Garonne avait engagé une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de la passation d’un accord-cadre décomposé en deux lots. La société Coved avait candidaté au lot n° 1 dédié à la collecte des déchets ménagers et assimilés en porte-à-porte.

L’offre de la société Coved n’ayant pas été retenue, celle-ci a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d’une requête en référé précontractuel afin de demander l’annulation de la procédure de passation du lot n° 1. Par une ordonnance du 23 août 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à sa demande et a annulé les décisions relatives à cette procédure de passation. La communauté de communes Convergence Garonne a formé un pourvoi en cassation contre cette ordonnance.

Le Conseil d’Etat a, au préalable, rappelé l’article L.551-1 du code de justice administrative relatif au référé précontractuel et la jurisprudence classique en matière d’intérêt à agir exigeant des sociétés évincées d’avoir un intérêt à conclure le contrat et d’être susceptibles d’avoir été lésées par le manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence invoqué 2)CE 3 octobre 2008 Smirgeomes, req. n° 305420. Le Conseil d’Etat a ensuite cité les dispositions de l’article R.2162-4 du code de la commande publique, dans sa version applicable au litige, qui prévoyaient que les accords-cadres pouvaient être conclus avec un maximum, ou un minimum, ou les deux ou encore, aucun des deux. Le rapporteur public, M. Marc Pichon de Vendeuil, résumera d’ailleurs cet article dans ses conclusions en disant « faites ce qu’il vous plaira ! ».

C’est dans ces conditions que la solution apportée par cet arrêt est intéressante.

Le Conseil d’Etat va en effet tirer les conclusions de l’arrêt de la cour de justice de l’Union Européenne Simonsen Weel A/S du 17 juin 2021 : pour mémoire, cet arrêt a précisé

l’interprétation à donner de l’article 5 alinéa 5 de la directive 2014/24/UE, « sans prévoir une application différée dans le temps », en considérant que la quantité et/ou valeur maximale des produits à fournir dans le cadre d’un des accords-cadres doit être indiquée dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges.

Et le Conseil d’Etat rappelle en outre que ce dispositif s’applique aux accords-cadres relevant de la directive et que pour les autres, un décret en Conseil d’Etat a modifié l’article R.2162-4 du code de la commande publique 3)Décret n° 2021-1111 du 23 août 2021 modifiant les dispositions du code de la commande publique relatives aux accords cadres et aux marchés publics de défense ou de sécurité qui avait été commenté sur notre blog : Actualité Modification des règles relatives aux accords-cadres et aux marchés publics de défense ou de sécurité, prévoyant désormais l’obligation de conclure les accords-cadres avec un maximum pour les consultations lancées à compter du 1er janvier 2022.

En d’autres termes, soit le montant de l’accord-cadre justifie l’application immédiate de la solution de la décision de la CJUE, soit le montant est inférieur aux seuils communautaires et dans ce cas, toute consultation lancée à partir du 1er janvier 2022 devra prévoir que l’accord-cadre comporte un montant maximum en valeur ou quantité.

En l’espèce, l’accord cadre en litige relevait du champ d’application de la directive européenne et le Conseil d’Etat souligne que ni l’avis de marché, ni le cahier des clauses techniques particulières, ni aucune pièce du marché ne précisait de quantité ou valeur maximale des produits à fournir pour le lot n°1. Il considère que l’absence de précision de la quantité/valeur maximum de l’accord-cadre était de nature à léser la société évincée qui n’avait pas pu présenter une offre adaptée aux prestations maximales auxquelles elle pourrait être amenée à répondre. En conséquence, il rejette le pourvoi de la communauté de communes Convergence Garonne.

Désormais, plus aucun doute n’est permis, les accords-cadres sans maximum c’est fini.

 

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