Le droit à l’indemnisation du manque à gagner ne peut être ouvert qu’à un seul des candidats évincés

Catégorie

Contrats publics

Date

January 2024

Temps de lecture

2 minutes

CE 28 novembre 2023 Commune de Saint-Cyr-sur-Mer, req. n°468867 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

C’est ce qui résulte d’une décision du 28 novembre 2023, par laquelle le Conseil d’Etat revient sur la condition, pour qu’un candidat irrégulièrement évincé obtienne l’indemnisation de son manque à gagner, qu’il ait eu une chance sérieuse de remporter le contrat.

En l’espèce, la commune de Saint-Cyr-sur-Mer a attribué le lot n°7 d’une sous-concession de plage à la société MGPL.

Saisi d’un recours en contestation de la validité du contrat par la société La Royale Plage, candidate évincée, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d’annulation du contrat assortie de conclusions indemnitaires. En appel, après avoir confirmé l’irrecevabilité des conclusions en annulation, la cour administrative d’appel de Marseille a fait droit aux conclusions indemnitaires de La Royale Plage et condamné la commune à l’indemniser de son manque à gagner et de son préjudice moral à hauteur de 80 039 euros.

La commune de Saint-Cyr-sur-Mer s’est alors pourvue en cassation.

Le Conseil d’Etat commence par rappeler que, lorsqu’il est saisi par un candidat d’une demande tendant à la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de la procédure de passation, il appartient au juge de vérifier si ce candidat était ou non dépourvu de toute chance de remporter le contrat 1)CE 18 juin 2003 Groupement d’entreprises solidaires ETPO Guadeloupe et autres, req. n°249630.

Trois hypothèses sont alors à distinguer :

En l’absence de toute chance d’emporter le contrat, le requérant n’a droit à aucune indemnité

S’il n’était pas dépourvu de toute chance, il a droit au remboursement des frais engagés pour la présentation de son offre

Si ses chances d’emporter le contrat étaient sérieuses, il a droit à l’indemnisation de son manque à gagner, qui inclut nécessairement, puisqu’ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l’offre

Cette affaire est l’occasion pour les juges du Palais Royal de préciser la caractérisation du caractère sérieux des chances perdues, seul à même d’ouvrir au candidat le droit à l’indemnisation de son manque à gagner.

A cet égard, le Conseil d’Etat estime que la cour administrative d’appel de Marseille ne pouvait se fonder sur la seule circonstance que l’offre finale de la requérante n’aurait pas eu une valeur inférieure à celles des trois autres candidats admis à négocier.

Elle devait apprécier « si, en l’absence de faute de la commune, la société La Royale Plage aurait eu des chances sérieuses d’emporter le contrat au contraire de tous les autres candidats ».

Comme l’explique le rapporteur public Nicolas Labrune dans ses conclusions, il ne suffit pas d’établir que son offre aurait eu autant de chance que les autres de l’emporter en l’absence de faute résultant de l’irrégularité : « (…) il nous semble certain qu’il ne peut jamais y avoir qu’un seul candidat évincé privé d’une chance sérieuse de remporter le contrat. »

Le droit à l’indemnisation du manque à gagner ne peut alors bénéficier qu’à ce candidat, à l’exclusion de tout autre.

En l’espèce, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit.

Le Conseil d’Etat annule l’arrêt en tant qu’il a condamné la commune de Saint-Cyr-sur-Mer à verser la somme de 80 039 euros à la société La Royale Plage et renvoie l’affaire à la cour administrative d’appel de Marseille.

 

 

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References   [ + ]

1. CE 18 juin 2003 Groupement d’entreprises solidaires ETPO Guadeloupe et autres, req. n°249630

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