Travaux sur construction existante soumis à déclaration préalable jusqu’à 40 m² de création de surface de plancher

Catégorie

Aménagement commercial, Urbanisme et aménagement

Date

September 2020

Temps de lecture

4 minutes

CAA Paris 25 mai 2020, req. n° 19PA00102

Dans les faits, la société Lidl a déposé devant la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) de Paris une demande d’autorisation pour la création d’un magasin alimentaire d’une surface de vente de 991,04 m² 1)Le seuil de soumission à autorisation d’exploitation commerciale (AEC) de 1 000 m² prévu à l’article L. 752-1 du code de commerce est en effet abaissé à 400 m² à Paris, en vertu de l’article 59 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain : « A titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2018, les seuils de surface de vente, mentionnés aux 1° et 2°, à la seconde phrase du 3° et aux 4° à 6° de l’article L. 752-1 du code de commerce, à partir desquels certains projets d’exploitation commerciale sont soumis à une autorisation sont ramenés, à Paris, à 400 mètres carrés. (…) ». dans le 12ème arrondissement de Paris.

La société Lidl a ensuite contesté le refus opposé par la CDAC le 3 juillet 2018 devant la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) qui a accordé l’autorisation sollicitée par une décision du 8 novembre 2018.

La société Servidis, concurrente qui exerce son activité dans la zone de chalandise du projet Lidl, a demandé à la cour administrative d’appel (CAA) de Paris d’annuler cette autorisation.

En plus des moyens classiques pouvant être développés à l’encontre d’une autorisation d’exploitation commerciale (AEC) 3)Lesquels tiennent à critiquer la régularité des avis des ministres chargés du commerce et de l’urbanisme, la composition du dossier de demande, et l’appréciation portée par la CNAC sur les effets du projet au regard des critères fixés par l’article L. 752-6 du code de commerce, c’est-à-dire l’aménagement du territoire, le développement durable et la protection des consommateurs. que nous n’analyserons pas dans le cadre du présent commentaire, la requérante soulève un moyen intéressant qui donne, pour la première fois à notre connaissance, l’occasion à la CAA de Paris d’interpréter les dispositions de l’article R. 421-17 du code de l’urbanisme sur le champ d’application de la déclaration préalable (DP), afin de déterminer si le projet aurait dû faire l’objet d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (PCvAEC), et non pas simplement d’une DP et d’une AEC autonome.

En effet, sur ce point, rappelons brièvement que depuis la fusion des PC et des AEC opérée par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite loi « Pinel » ou « ACTPE », lorsqu’un projet est soumis à AEC en application de l’article L. 752-1 du code de commerce, le PC tient lieu d’AEC dès lors que la demande a fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC).

Cette règle, codifiée à l’article L. 425-4 du code de l’urbanisme, est en l’espèce rappelée par la CAA.

En revanche, lorsqu’un projet soumis à AEC ne nécessite pas de PC pour sa réalisation 2)Voir article L. 752-17 II du code de commerce rappelé par la CAA : « Lorsque la réalisation du projet ne nécessite pas de permis de construire, les personnes mentionnées au premier alinéa du I peuvent, dans un délai d’un mois, introduire un recours contre la décision de la commission départementale d’aménagement commercial. »., soit parce qu’il est dispensé de formalités soit parce que, comme en l’espèce, il est soumis à DP, la nature de l’acte par lequel la CNAC statue est une décision faisant grief susceptible de recours pour excès de pouvoir (REP) devant le juge administratif 4)Pour des précisions sur ce point, nous vous renvoyons aux arrêts CE 14 novembre 2018 Société MGE Normandie et autres, req. n° 409833 : Publié au Rec. Lebon (cf. notre commentaire du blog) – CE 27 janvier 2020 Sociétés Sodipaz, AG-Zinate et Les Charmes, req. n° 423529 : Mentionné aux T. Rec. CE (cf. notre commentaire du blog) – CE 27 janvier 2020 Société Distribution Casino France, req. n° 422287 : Mentionné aux T. Rec. Lebon (cf. notre commentaire du blog)..

Et, selon la requérante, le projet était soumis à l’obtention d’un PCvAEC et non pas à une DP et une AEC autonome.

La CAA de Paris a donc dû vérifier que le projet litigieux entrait bien dans le champ d’application de la DP.

Aux termes de l’article R. 421-17 du code de l’urbanisme cité par la CAA :

« Doivent être précédés d’une déclaration préalable lorsqu’ils ne sont pas soumis à permis de construire en application des articles R*421-14 à *R. 421-16 les travaux exécutés sur des constructions existantes, à l’exception des travaux d’entretien ou de réparations ordinaires, et les changements de destination des constructions existantes suivants :

      a) Les travaux ayant pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant, à l’exception des travaux de ravalement ;

(…)

      f) Les travaux qui ont pour effet la création soit d’une emprise au sol, soit d’une surface de plancher supérieure à cinq mètres carrés et qui répondent aux critères cumulatifs suivants :

     – une emprise au sol créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés ;

     – une surface de plancher créée inférieure ou égale à vingt mètres carrés.

Ces seuils sont portés à quarante mètres carrés pour les projets situés en zone urbaine d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu, à l’exclusion de ceux impliquant la création d’au moins vingt mètres carrés et d’au plus quarante mètres carrés de surface de plancher ou d’emprise au sol lorsque cette création conduit au dépassement de l’un des seuils fixés à l’article R*431-2 du présent code. ».

Les juges du fond confirment l’interprétation à avoir de ces dispositions : lorsqu’un bâtiment existant dépasse déjà le seuil de 150 m² de SDP ou d’emprise au sol, les travaux portant sur la création de 0 à 40 m² de SDP est soumis à DP et non à permis de construire :

«  En second lieu, à supposer même que la surface de plancher créée du fait de la suppression de la trémie de l’escalier reliant le rez-de-chaussée au sous-sol soit de 21 m² et non de 18 m² ainsi que déclaré par la société Lidl, cette seule circonstance n’a pas pour effet de soumettre le projet à l’obtention d’un permis de construire, dès lors qu’en application des dispositions précitées de l’article R. 421-17 du code de l’urbanisme, le seuil de soumission au permis de construire est en l’espèce de 40 m², le projet étant situé en zone urbaine du plan local d’urbanisme de la Ville de Paris et la création de 21 m² de surface de plancher ne conduisant pas au dépassement du seuil de 150 m² fixé à l’article R. 431-2 du même code, le bâtiment existant dépassant déjà ce seuil.
13. Il résulte de ce qui précède que le projet de la société Lidl relevait de la déclaration préalable. Contrairement à ce que soutient la société Servidis, la commission nationale d’aménagement commercial n’a dès lors pas commis d’erreur de droit en prenant une décision et non pas en émettant un simple avis
 ».

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References   [ + ]

1. Le seuil de soumission à autorisation d’exploitation commerciale (AEC) de 1 000 m² prévu à l’article L. 752-1 du code de commerce est en effet abaissé à 400 m² à Paris, en vertu de l’article 59 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain : « A titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2018, les seuils de surface de vente, mentionnés aux 1° et 2°, à la seconde phrase du 3° et aux 4° à 6° de l’article L. 752-1 du code de commerce, à partir desquels certains projets d’exploitation commerciale sont soumis à une autorisation sont ramenés, à Paris, à 400 mètres carrés. (…) ».
2. Voir article L. 752-17 II du code de commerce rappelé par la CAA : « Lorsque la réalisation du projet ne nécessite pas de permis de construire, les personnes mentionnées au premier alinéa du I peuvent, dans un délai d’un mois, introduire un recours contre la décision de la commission départementale d’aménagement commercial. ».
3. Lesquels tiennent à critiquer la régularité des avis des ministres chargés du commerce et de l’urbanisme, la composition du dossier de demande, et l’appréciation portée par la CNAC sur les effets du projet au regard des critères fixés par l’article L. 752-6 du code de commerce, c’est-à-dire l’aménagement du territoire, le développement durable et la protection des consommateurs.
4. Pour des précisions sur ce point, nous vous renvoyons aux arrêts CE 14 novembre 2018 Société MGE Normandie et autres, req. n° 409833 : Publié au Rec. Lebon (cf. notre commentaire du blog) – CE 27 janvier 2020 Sociétés Sodipaz, AG-Zinate et Les Charmes, req. n° 423529 : Mentionné aux T. Rec. CE (cf. notre commentaire du blog) – CE 27 janvier 2020 Société Distribution Casino France, req. n° 422287 : Mentionné aux T. Rec. Lebon (cf. notre commentaire du blog).

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