Urbanisation en zone de montagne – Précisions sur le principe d’urbanisation en continuité d’un groupe de constructions traditionnelles ou d’habitations existantes

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

November 2019

Temps de lecture

3 minutes

CE 2 octobre 2019, req. n° 418666 : mentionné dans les tables du recueil Lebon

Par une décision du 2 octobre 2019, le Conseil d’État affine sa jurisprudence en matière d’urbanisation en zone de montagne, et plus particulièrement s’agissant de la notion de « groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existantes » telle qu’issue de l’ancien article L. 145-3 III du code de l’urbanisme (aujourd’hui codifié aux articles L. 122-5, L. 122-5-1 et L. 122-6 du même code).

En l’espèce, le maire de la commune de Broc a délivré, par arrêtés des 11 juin et 16 juillet 2013, deux permis de construire autorisant la construction de deux maisons d’habitation dont l’une avec piscine, au lieu-dit La Clave, lequel est situé en zone de montagne et s’inscrit dans les « espaces naturels » délimités par la directive territoriale d’aménagement du territoire des Alpes-Maritimes, et dans lesquels est admis « le confortement (…) des groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants ».

Saisi d’un recours pour excès de pouvoir, le tribunal administratif de Nice a rejeté, par un jugement du 26 février 2016, les demandes tendant à l’annulation des deux arrêtés de permis de construire.

Ce jugement a été annulé par la cour administrative d’appel de Marseille qui, par un arrêt du 28 décembre 2017 (req. n° 16MA01736), a relevé que « les habitations existantes dans ce secteur, au nombre d’une dizaine, étaient espacées de 25 à 40 mètres et que le secteur n’était pas desservi par les réseaux d’eau et d’assainissement » et en a déduit que les projets litigieux n’étaient pas situés en continuité avec un groupe d’habitations existant . La cour a donc annulé les permis attaqués.

C’est dans ce contexte que la commune du Broc et la société bénéficiaire du permis de construire ont formé un pourvoi devant le Conseil d’État.

Pour mémoire, aux termes du III de l’article L. 145-3 ancien du code de l’urbanisme, (aujourd’hui repris à l’article L. 122-5) applicable en zone de montagne aux faits de l’espèce :

« Sous réserve de l’adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l’extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d’installations ou d’équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants ».

Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord qu’il appartient à l’autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d’autorisation d’occupation ou d’utilisation du sol mentionnée au second alinéa de l’article L. 145-2 du code de l’urbanisme (nouvel article L. 122-2) de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de la conformité du projet aux dispositions du code de l’urbanisme particulières à la montagne, le cas échéant au regard des prescriptions d’une directive territoriale d’aménagement demeurée en vigueur qui sont suffisamment précises et compatibles avec les dispositions des articles L. 145-1 et suivants du même code.

Il précise ensuite, qu’il ressort de la lecture de l’article L. 145-3 III du code de l’urbanisme et des travaux préparatoires de la loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 « Urbanisme et Habitat » qui les a modifiées, que l’urbanisation en zone de montagne, sans être autorisée en zone d’urbanisation diffuse, peut être réalisée non seulement en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, mais également en continuité avec les « groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants ».

Selon la Haute juridiction, ces dispositions permettent la réalisation de constructions nouvelles en continuité d’un groupe de constructions traditionnelles ou d’un groupe d’habitations qui, ne s’inscrivant pas dans les traditions locales, ne pourrait être regardé comme un hameau.

Pour déterminer, si un groupe de constructions peut être qualifié de « groupe de constructions traditionnelles ou d’habitations existant », le Conseil d’État estime qu’il convient de vérifier que le groupe est composé de plusieurs constructions « qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l’existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble ».

Le Conseil d’État confirme ainsi le raisonnement des juges du fond qui, pour juger que les projets litigieux n’étaient pas situés en continuité avec un groupe d’habitations existant, ont relevé, en se fondant sur les critères susvisés et sur les prescriptions de la directive territoriale d’aménagement des Alpes-Maritimes, que « les habitations existantes dans ce secteur, au nombre d’une dizaine, étaient espacées de 25 à 40 mètres et que le secteur n’était pas desservi par les réseaux d’eau et d’assainissement ».

Partant, la cour administrative d’appel de Marseille n’a donc pas commis d’erreur de droit en jugeant que les projets litigieux méconnaissaient les dispositions de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme.

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