Précisions sur les conditions d’appréciation de la saturation visuelle occasionnées par les parcs éolien

Catégorie

Environnement

Date

December 2024

Temps de lecture

3 minutes

CE 13 décembre 2024 Société Parc éolien du Chemin perdu, req. n° 465368 : Rec. CE Tables

Par une décision du 13 décembre 2024, le Conseil d’Etat affine sa jurisprudence sur les conditions dans lesquelles un projet de parc éolien est de nature à créer une « saturation visuelle » prise en compte au titre des inconvénients d’un projet pour la commodité du voisinage : si l’appréciation de l’impact visuel d’un projet éolien peut intégrer les projets alors en cours d’instruction concomitante sous réserve qu’ils soient sur le point d’être autorisés, il y a en revanche lieu, de manière logique, d’exclure de cette analyse les projets ayant déjà fait l’objet d’un refus, même non définitif.

Par un arrêté du 5 mars 2021, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de délivrer à la société Parc éolien du Chemin Perdu une autorisation environnementale pour l’exploitation d’un parc éolien composé de six aérogénérateurs et deux postes de livraison sur le territoire de deux communes, fondé notamment sur l’effet de saturation visuelle engendré par le projet.

Par un arrêt du 3 mai 2022, la cour administrative d’appel de Douai a rejeté la requête de la société pétitionnaire tendant à l’annulation de cet arrêté et a confirmé le refus d’autorisation environnementale sollicitée. La société requérante s’est pourvue en cassation.

Pour mémoire, le Conseil d’Etat a déjà précédemment établi, en matière de contentieux éolien, que l’existence d’une saturation visuelle générée par un projet est susceptible d’emporter des inconvénients pour la commodité du voisinage listée parmi les intérêts protégés par le régime des installations classées pour la protection de l‘environnement et prévus par les dispositions de l’article L. 511‑1 du code de l’environnement 1)CE 1er mars 2023 société EDPR France Holding, req. n° 459716 : mentionné aux T. du Rec. CE – voir l’article du blog Adden : « Prise en compte des inconvénients pour la commodité du voisinage d’un projet éolien : la différence d’approche entre le code de l’urbanisme et le code de l’environnement ».

Plus récemment, le Conseil d’Etat a plus précisément défini le cadre d’appréciation du phénomène de saturation visuelle : il considère en effet que la circonstance que les éoliennes ne seraient pas toutes simultanément visibles depuis un même point n’est pas, par elle-même, de nature à permettre d’écarter l’existence d’un effet de saturation, et qu’il convient, d’autre part, de tenir compte de l’effet d’encerclement lié à la réduction de l’angle d’occupation et de respiration, défini comme le plus grand angle continu sans éolienne depuis les points de vue pertinents. Celle‑ci doit être appréciée au regard de l’ensemble des parcs installés ou autorisés et de la configuration particulière des lieux, notamment en termes de reliefs et d’écrans visuels 2)CE 10 novembre 2023 ministre de la Transition Ecologique, n°459079 : mentionné aux T. du Rec. CE – voir l’article du blog Adden : « Une éolienne peut en cacher une autre : précision sur la consistance de la notion de saturation visuelle ».

Reprenant ces principes d’appréciation de la notion de saturation visuelle définis précédemment, le Conseil d’Etat apporte par l’arrêt commenté une nouvelle précision sur cette méthodologie d’appréciation : outre les projets installés ou autorisés, il est possible de prendre en compte des projets de parcs éoliens en cours d’instruction concomitante, à condition qu’ils soient néanmoins sur le point d’être autorisés. A l’inverse, les projets ayant fait l’objet d’un refus d’autorisation, même non définitif, à la date de la décision en cause, doivent être exclus de cette évaluation.

Dès lors, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Douai en ce qu’elle avait admis, pour l’appréciation de la saturation visuelle, la prise en compte de cinq projets éoliens alors que trois d’entre eux avaient d’ores et déjà été refusés par le préfet à la date à laquelle il avait refusé d’autoriser le projet en cause.

 

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1. CE 1er mars 2023 société EDPR France Holding, req. n° 459716 : mentionné aux T. du Rec. CE – voir l’article du blog Adden : « Prise en compte des inconvénients pour la commodité du voisinage d’un projet éolien : la différence d’approche entre le code de l’urbanisme et le code de l’environnement »
2. CE 10 novembre 2023 ministre de la Transition Ecologique, n°459079 : mentionné aux T. du Rec. CE – voir l’article du blog Adden : « Une éolienne peut en cacher une autre : précision sur la consistance de la notion de saturation visuelle »

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