Un permis de construire modificatif permet de régulariser le permis initial en cours d’instance dans le cadre de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme sans qu’il soit nécessaire que le dossier de demande indique expressément qu’il était sollicité à cet effet

Catégorie

Urbanisme et aménagement

Date

July 2023

Temps de lecture

3 minutes

CE 30 juin 2023 Société AFC Promotion, req. n° 463230 : mentionné aux tables du recueil Lebon

Dans une décision du 30 juin 2023, le Conseil d’Etat apporte de nouvelles précisions concernant les modalités de régularisation d’un permis de construire par le biais d’un permis de construire modificatif dans le cadre de la procédure prévue par l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.

Pour rappel, les dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme insérées par l’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 permettent au juge administratif 1)Etant rappelé que les pouvoirs conférés par les dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme sont réservés au juge du fond : CE 22 mai 2015 Société Paolina, req. n°385183 : voir notre article sur le blog. saisi de conclusions dirigées contre une autorisation d’urbanisme, lorsqu’il constate qu’un vice entachant l’illégalité de l’autorisation est susceptible d’être régularisé, de surseoir à statuer afin de permettre au titulaire de régulariser ce vice dans un délai qu’il fixe dans un jugement avant-dire droit 2)Le Conseil d’Etat a toutefois admis que le juge administratif pouvait tenir compte des mesures de régularisation intervenues même postérieurement à l’expiration du délai accordé dans le jugement avant-dire droit : CE 16 février 2022 Société MSE la Tombelle, req. n° 420554 : Publié au recueil Lebon : voir notre article sur le blog..

S’il est admis par une jurisprudence constante qu’un vice de forme ou de procédure puisse faire l’objet d’une régularisation en cours d’instance 3)CE 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, req. n° 238315 ; CE 27 mai 2019,  Min. de la Cohésion des territoires et Sté MSE La Tombelle, req. n° 420554 : Mentionné aux Tables du Rec. CE, pour un vice de procédure., le Conseil d’Etat précise dans la décision commentée que cette possibilité est également ouverte s’agissant d’un vice d’incompétence.

En effet, dans la présente affaire, le tribunal administratif de Toulouse, saisi d’un recours en annulation d’un permis de construire accordé à la société AFC Promotion, a sursis à statuer en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme après avoir constaté l’existence d’un vice tiré de l’absence de publication ou d’affichage conforme de l’arrêté portant délégation de fonctions à l’adjoint au maire, de sorte que cet arrêté n’était pas exécutoire à la date du permis de construire.

La société AFC Promotion a déposé une demande de permis de construire modificatif aux fins de régulariser ce vice, qui lui a été accordé.

Le tribunal administratif a toutefois considéré que ce permis modificatif n’avait pu régulariser le vice entachant d’illégalité le permis initial au motif que « le dossier de demande de permis modificatif ne spécifiait pas qu’il était sollicité à cette fin ».

Après avoir repris son considérant de principe en la matière 4)Ce considérant a également été repris récemment dans une décision CE 4 mai 2023 Société Octogone, req. n° 464702 : Publié au Rec. CE : voir notre article sur le blog., la Haute juridiction censure ce raisonnement :

« En déduisant de cette seule circonstance que le permis de construire modificatif délivré ne pouvait être regardé comme ayant régularisé le vice dont était entaché le permis de construire initial, sans rechercher s’il ne résultait pas d’autres éléments du dossier, tels que la chronologie dans laquelle s’inscrivait la demande de permis modificatif ou les échanges intervenus avec la commune à l’occasion de son instruction, qu’il avait en l’espèce eu cet objet, le tribunal a commis une erreur de droit ».

Il en résulte que le dossier de demande de permis de construire modificatif n’a pas à mentionner expressément que ce permis est demandé en vue de satisfaire une invitation à régulariser formulée par le juge en cours d’instance. Un permis de construire modificatif aura pour effet de régulariser l’autorisation initiale dès lors que les éléments du dossier dont dispose le juge lui suffisent à en déduire qu’il avait bien cet objet.

Cette décision s’inscrit une fois de plus dans le cadre d’une jurisprudence 5)Voir notamment en ce sens CE 16 février 2022 Société MSE la Tombelle, précité et CE 17 mars 2021 Mme V, req. n° 436073 : voir notre article sur le blog. qui tend à admettre largement la régularisation des autorisations d’urbanisme en cours d’instance.

 

 

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1. Etant rappelé que les pouvoirs conférés par les dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme sont réservés au juge du fond : CE 22 mai 2015 Société Paolina, req. n°385183 : voir notre article sur le blog.
2. Le Conseil d’Etat a toutefois admis que le juge administratif pouvait tenir compte des mesures de régularisation intervenues même postérieurement à l’expiration du délai accordé dans le jugement avant-dire droit : CE 16 février 2022 Société MSE la Tombelle, req. n° 420554 : Publié au recueil Lebon : voir notre article sur le blog.
3. CE 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, req. n° 238315 ; CE 27 mai 2019,  Min. de la Cohésion des territoires et Sté MSE La Tombelle, req. n° 420554 : Mentionné aux Tables du Rec. CE, pour un vice de procédure.
4. Ce considérant a également été repris récemment dans une décision CE 4 mai 2023 Société Octogone, req. n° 464702 : Publié au Rec. CE : voir notre article sur le blog.
5. Voir notamment en ce sens CE 16 février 2022 Société MSE la Tombelle, précité et CE 17 mars 2021 Mme V, req. n° 436073 : voir notre article sur le blog.

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